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indique seulement 4 degrés centigrades. À mesure qu’on s’éloigne de l’équateur, la nappe superficielle perd de sa chaleur, la limite de il degrés se relève vers la surface, et dans le voisinage du cercle polaire elle finit par atteindre le niveau de l’océan. Au-delà et en se rapprochant de l’un ou l’autre pôle, les eaux supérieures continuent d’être de plus en plus froides ; en revanche la température s’accroît dans le sens vertical, et la couche des eaux à 4 degrés s’abaisse peu à peu jusqu’à une profondeur de 1,400 mètres. Admettant avec les physiciens de son temps que l’eau de mer a sa plus grande densité et par conséquent son plus grand poids relatif à 4 degrés au-dessus du point de congélation, James Ross en concluait que toutes les eaux profondes reposant sur le lit de la mer ont uniformément cette même température de 4 degrés, et se sont enfoncées en vertu de leur poids au-dessous de toutes les autres couches, plus chaudes ou plus froides.

Toutefois Neumann et d’autres savans ont établi que, si la plus forte densité de l’eau douce correspond en effet à 4 degrés centigrades, l’eau de mer n’atteint ce maximum de poids qu’à moins de 2 degrés au-dessous du point de glace, et par cela même la théorie que Ross avait imaginée sur la foi de sondages insuffisans se trouve complètement renversée. Les expériences faites dans les petits laboratoires de chimie, où les substances sont traitées en faibles quantités, ne sauraient, il est vrai, donner une idée parfaitement exacte des phénomènes qui ont pour théâtre la nature elle-même, et qui s’accomplissent soit dans les espaces de l’air, soit dans les grands bassins océaniques. Il est donc fort possible, ainsi que le célèbre météorologiste Mübry l’a prétendu dans un récent travail, que l’eau salée contenue dans un baquet et les flots de la mer immense n’obéissent pas absolument aux mêmes lois de température et de densité ; mais en attendant que la différence soit constatée, rien n’autorise à maintenir quand même et contre toutes les expériences des chimistes une théorie surannée d’après laquelle les masses salées de la mer offriraient en se refroidissant des phénomènes identiques à ceux des lacs d’eau douce. D’ailleurs, dans les dernières années, de nombreux observateurs des mers polaires ont trouvé à de grandes profondeurs au-dessous de la surface des couches liquides dont la température était inférieure à 4 degrés[1], et tout récemment le professeur Edlund de Sockholm a constaté que dans la mer Baltique et sur les côtes occidentales de la Norvège la glace se forme d’ordinaire au fond, où les eaux sont à la fois plus froides et plus lourdes. Ce sont là des faits décisifs

  1. Fitz-Roy, Weather-book.