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personnes étrangères à la marine ne peuvent se livrer à cette industrie, puisque le seul fait de s’occuper de pêche suffirait pour les faire porter sur les registres d’inscription ; mais, lors même que cette prescription n’existerait pas, comment supposer qu’elles consentiront à créer des établissemens de quelque importance avec la perspective d’en être dépouillées d’un moment à l’autre ? La première condition pour faire prospérer une industrie, c’est la sécurité des personnes qui s’y livrent et celle des capitaux qui s’y portent ; or ici l’une et l’autre font défaut. Pour leur donner les garanties qui leur manquent, il faudrait d’une part consentir à l’aliénation des rivages dont la conservation n’est pas indispensable à la navigation, d’autre part changer complètement les règlemens relatifs à l’inscription maritime.

Pour ce qui est de l’aliénation des rivages, rien ne serait plus facile ; l’opération serait financièrement très fructueuse, car ces terrains, pouvant rapporter net jusqu’à 1,500 fr. par hectare, ont une valeur considérable, et l’on a peine à croire que l’état propose périodiquement des aliénations importantes de forêts, quand il a sous la main des immeubles improductifs qui se vendraient fort cher, et dont les particuliers pourraient tirer un grand parti. Il en résulterait pour le pays un double avantage. Cette opération a du reste été recommandée chaudement par le rapporteur de la loi sur la pêche votée en 1865 ; il y a donc lieu d’espérer qu’elle ne tardera pas à être réalisée, ne serait-ce qu’à titre d’essai. Quant à l’inscription maritime, il ne sera malheureusement pas aussi facile d’en avoir raison ; condamnée par la morale et par l’économie politique, cette institution, qui est un véritable servage, est encore jugée indispensable au recrutement de la marine militaire. Pour bien des personnes, cette raison domine toutes les autres, et devant un parti-pris aussi arrêté il y a peu d’espoir de les convertir ; au moins faut-il qu’elles sachent que c’est là le principal obstacle à ce que M. Coste a si justement appelé la mise en culture de la mer.


III.

La pêche fluviale, comme la pêche maritime, était représentée à l’exposition par un aquarium très artistement arrangé. Tout le monde a vu cette grotte autour de laquelle les poissons de nos fleuves, placés dans des bacs à parois transparentes, s’ébattaient aux regards des curieux, les uns se cachant dans les herbes aqua tiques dont le fond était tapissé, les autres se plaçant à l’affût sous les rochers qui simulaient le lit de la rivière. Peut-être faut-il re-