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UNE FAVORITE
AU DIX-HUITIÈME SIÈCLE

Madame de Pompadour et la Cour de Louis XV au milieu du dix-huitième siècle, avec documens inédits, par M. Émile Campardon, 1 vol. in-8o, Plon, éditeur, 1868.

Elles sont passées, elles ne reviendront plus, toutes ces princesses d’aventure à qui les amours royales faisaient une couronne équivoque, et qui ont laissé dans la poussière de l’histoire, dans cette poussière pétrie de sang et de larmes, je ne sais quelle odeur musquée de fard vieilli et de poudre d’iris. D’autres viendront pour faire les mêmes choses, et ne vaudront pas mieux ou vaudront tout autant ; mais de ces femmes subitement élevées par un caprice de sultan ennuyé, gagnant du soir au lendemain le tabouret à la cour et un appartement à Versailles, faisant et défaisant des ministres, jouant avec la puissance dans leur boudoir, de ces reines improvisées, il ne peut plus y en avoir, parce qu’il n’y a plus de tabouret à donner, parce qu’il n’y plus de Versailles, parce qu’il n’y a plus de rois. Les rois, les rois ! il n’y a plus de rois, et il n’y a plus de favorites comme on l’entendait autrefois. Il n’y a plus que des chefs de l’état et il n’y a plus que des favorites inavouées, sans rôle public et sans prestige, maigrement récompensées pour leur bon vouloir d’un moment. Leur fonction n’est plus comptée parmi les u grands offices de la couronne. » On ne leur dit plus, selon le mot spirituellement acre de Chamfort : « Le poste où vous êtes élevée… » Elles ne disent plus : « La place que j’occupe… » Travailler aux plaisirs du roi, ce n’est plus un métier qui s’appelle de « l’attachement à l’état. » Les rois sont tombés au rang des autres hommes ; ils peuvent aimer obscurément, s’ils sont assez heureux pour être touchés du rayon sacré. S’ils n’ont que des fantaisies libidineuses, comme on l’a vu quelquefois, ils ne peuvent