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Le morose et violent président Johnson soutiendra-t-il la brigue d’une réélection ? Il ne se déclare point encore ; mais les changemens qu’il opère dans les commandemens militaires annoncent qu’il est bien décidé à employer l’influence de l’administration dans la prochaine élection présidentielle. e. forcade.



ESSAIS ET NOTICES.

LA STATUE DE SOPHOCLE ET LE MUSÉE DE LATRAN.

Au moment où la question romaine soulève tant de problèmes redoutables, c’est un curieux spectacle que celui des archéologues poursuivant au milieu des passions contraires leur travail paisible et opiniâtre. Notre Joachim Dubellay disait déjà au xvie siècle :

Rome vivant fut l’ornement du monde,
Et, morte, elle est du monde le tombeau.

Ce tombeau du monde, où chaque génération est venue chercher les traces des anciens âges, devait exciter chez les savans de nos jours une curiosité plus attentive encore et plus hardie. Sans parler du mouvement d’études qui renouvelle sous nos yeux la science de l’antiquité et auquel l’archéologie prête si heureusement ses ressources agrandies, la situation tragique de la ville éternelle était un stimulant de plus pour l’activité des chercheurs. Soit que les ruines du passé, à la veille des transformations inévitables, inspirassent à des esprits religieux une sympathie plus vive, soit que des âmes contemplatives et impartiales, frappées de ces spectacles, voulussent y étudier les lois de la philosophie de l’histoire, les raisons ne manquaient pas pour diriger sur ce point les recherches de l’érudition. La France et l’Allemagne, aussi bien que l’Italie, ont répondu à cet appel des circonstances. Est-il besoin de citer les noms des Borghesi, des Rossi, des Mommsen, des Henzen, et les excellens travaux que M. Gaston Boissier a consacrés ici même à ces maîtres de l’épigraphie ? L’œuvre des Allemands sur ce terrain de l’archéologie romaine mérite une attention particulière ; ce sont eux surtout qui ont porté dans ces recherches l’inspiration contemplative dont je parlais tout à l’heure. Avec quel soin, pour ne donner qu’un seul exemple, avec quels scrupules et quelle impartialité M. Ferdinand Gregorovius s’applique depuis des années à retracer l’histoire de Rome au moyen âge, l’histoire de Rome sous le gouvernement des papes, cette histoire dont les matériaux sans nombre, éparpillés en tous lieux, attendaient encore la main