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de signaux placés à chaque embranchement seraient les chevilles. L’endroit est curieux, car on y comprend mieux que partout ailleurs la complication et la simplicité des manœuvres. Un son de huchet retentit au loin, il est immédiatement répété à l’entrée de la gare ; on voit un homme sortir d’une petite cabane vitrée, saisir le levier d’une aiguille, l’abaisser, modifier par ce seul mouvement la position d’un disque indicateur et mettre le train sur la voie qui doit le conduire à son quai spécial. Incessamment, pour les trains qui arrivent comme pour les trains qui partent, une manœuvra analogue se reproduit. Dès que la nuit approche, quand le brouillard s’épaissit, on allume sur les disques des feux dont la position déterminée, les couleurs différentes, verte, rouge, jaune, ont une signification particulière qui est comprise par tous les employés comme un ordre écrit. Les combinaisons diverses qui servent à acheminer un train vers un point précis et à lui réserver en temps utile une voie spéciale sont tellement ingénieuses et tellement claires, que les accidens survenus en gare, là même où les trains semblent des navettes toujours en mouvement, sont assez rares. Plusieurs années se passent souvent sans qu’on puisse en signaler un seul. Les aiguilleurs sont toujours à leur poste, on les choisit parmi les agens les plus intelligens et les plus attentifs ; leur travail, purement mécanique, n’exigé qu’une force. médiocre ; dès qu’un train doit passer devant eux, ils sont prévenus d’abord par le son du huchet, ensuite par le sifflement prolongé de la locomotive, enfin par une sonnette électrique placée près de leur guérite. Un agent particulier, chargé de l’inspection des aiguilles et des disques, est sans cesse sur la voie, surveillant les aiguilleurs, examinant les manœuvres, punissant toute négligence et assurant la prompte et stricte exécution du service. Le bon fonctionnement des signaux et le respect qu’ils imposent sont la meilleure garantie de sécurité pour un chemin de fer ; aussi le règlement contient-il cette prescription : tout employé, quel que soit son grade, doit obéissance passive aux signaux.

On a essayé souvent des signaux automatiques, mais on y a renoncé ; le meilleur instrument de sécurité, c’est encore l’homme, lorsqu’on est parvenu à lui faire comprendre l’importance de son devoir, et l’on rendra cette justice aux employés des chemins de fer, qu’ils connaissent et pratiquent le leur avec sagesse et ponctualité. Pour plus de sûreté néanmoins, on a, par un procédé très ingénieux, combiné le jeu des aiguilles avec celui des signaux, de telle sorte que, lorsqu’il dirige un train sur une voie, l’employé, avant de pouvoir manœuvrer l’aiguille, met forcément à l’arrêt le signal protecteur de cette voie. De plus, quand le signal est à l’arrêt, il amène sur le rail interdit un pétard détonant. Si, par suite