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du succès. La gent financière s’agite beaucoup pour la date de l’émission de l’emprunt, qu’elle voudrait voir aussitôt fait qu’annoncé ; mais il n’y a pour le trésor aucun intérêt à se presser. L’emprunt étant la conclusion des budgets, il est naturel et raisonnable d’attendre le moment où les budgets auront été discutés et votés. Dans ce délai même, le maintien de la paix se confirmera sans doute de plus en plus, la confiance, des capitaux sera mieux affermie, et le taux d’émission donné par les cours de la Bourse pourra être plus élevé. Avec des budgets sagement prévus et un emprunt réussi, M. Magne aura un point de départ excellent. Quant à nous, nous aurions voulu qu’on fît dans la situation financière la place tout à fait nette, et qu’on en finît dès cette année avec de vieux embarras et de vieilles misères. Pourquoi, par exemple, tiendrait-on encore pendant une année en suspens la régularisation des rapports de la ville de Paris avec le Crédit foncier ? On nage là dans l’illégalité à pleins bords. Il est certain que la ville de Paris n’avait pas le droit d’accumuler ses emprunts détournés, et d’exercer une perturbation économique inouïe sur le marché des valeurs foncières en appliquant les millions par centaines à la destruction de capitaux fonciers florissans, faisant ainsi d’une façon arbitraire et artificielle la rareté et la hausse dans une branche immense de la production. Il serait fâcheux aussi, pour les actionnaires et les obligataires du Crédit foncier, que cet établissement fût laissé dans la position fausse où il s’est placé avec une témérité inconcevable. La loi qui a autorisé le Crédit foncier à émettre des obligations communales lui a prescrit de n’en prêter le produit qu’aux communes qui ont la faculté d’emprunter, c’est-à-dire qui ont reçu cette faculté d’une loi votée par le corps législatif. Paris est une commune, est obligé de dire le Crédit foncier lorsqu’il escompte avec le produit des obligations les délégations de la ville ; mais l’assertion se retourne contre lui, car l’administration de la ville n’a point acquis de la loi la faculté d’emprunter. Cette transgression flagrante et systématiquement prolongée de la loi, qu’on n’en doute point, suspend une épée de Damoclès sur la sécurité des affaires. S’il en mésarrive un jour, on ne nous reprochera point de n’avoir pas signalé d’avance le danger par des avertissemens francs et réitérés.

Il y a une misère dont le gouvernement devrait se dépêtrer une fois pour toutes d’une façon équitable et honorable. Il s’agit encore de l’aveu d’une faute qui ne peut être pardonnée qu’à la condition d’être franchement réparée. Nous voulons parler de l’indemnité due aux victimes de la banqueroute mexicaine. Certes, à l’époque de la signature du traité de Miramar, lorsque Maximilien déclarait qu’il n’accepterait l’empire que la France lui voulait donner que si le concours financier s’ajoutait au concours militaire, une grave faute fut commise : le gouvernement, qui fournissait nos hommes au prétendant, n’osa point lui prêter directement son crédit. Comme nous l’avons vu arriver tant de fois de nos jours, on unit à une grande témérité une extrême timidité. Nous sommes