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fécondent par leurs utiles travaux tendent leurs mains suppliantes vers les pères du peuple en leur demandant qu’il leur soit enfin permis de suivre en paix la religion de leur cœur, d’en choisir à leur gré les ministres et de se reposer, au sein de leurs plus douces habitudes, de tous les maux qu’ils ont soufferts ! »


Il insistait sur l’importance des idées religieuses, sur leur influence morale, leurs jouissances touchantes, « indépendantes du pouvoir des hommes et des coups du sort, » les consolations dont elles sont pour les âmes à travers les inégalités des conditions et les vicissitudes de la vie :


« Leur besoin est senti surtout par les peuples en révolution : alors il faut aux malheureux l’espérance ; elles en font luire les rayons dans l’asile de la douleur, elles éclairent la nuit même du tombeau, elles ouvrent devant l’homme mortel et fini d’immenses et magnifiques perspectives. Législateurs, que sont vos autres bienfaits auprès de ce grand bien ? Vous plaignez l’indigent, les religions le consolent ; vous réclamez ses droits, elles assurent ses jouissances. Ah ! nous avons parlé souvent de notre amour pour le peuple, de notre respect pour ses volontés : si ce langage ne fut pas vain dans nos bouches, respectons avant tout des institutions si chères à la multitude. De quelque nom que notre haute philosophie se plaise à les désigner, quelles que soient les jouissances plus exquises auxquelles nous pensons qu’elle nous admet, c’est là que le peuple a arrêté ses volontés, c’est là qu’il a fixé ses affections ; il nous suffit, et tous nos systèmes doivent s’abaisser devant sa volonté souveraine. »


Tout en s’exprimant en philosophe, on le voit, mais en philosophe politique qui cherche à donner un fondement profond à la moralité, et qui ne dédaigne pas de lui trouver la sanction la plus intime, il essayait d’attendrir pour la première fois la législation, et, en la laissant égale pour tous les cultes, de lui infuser une pensée de sollicitude et d’intérêt supérieur pour chacun d’eux :


« Que la liberté que vous accordez à tous les cultes ne soit donc point en vous l’effet d’une égale indifférence, encore moins d’un égal mépris ; comme cette tolérance dont se parèrent longtemps de dangereux sophistes ; mais qu’elle soit le fruit d’une sincère affection. Vous ne devez pas seulement les souffrir, vous devez les protéger tous, parce que tous entretiennent la morale, parce que tous sont utiles aux hommes… »


Aucun secours direct de l’autorité civile, à la bonne heure ! aucune préférence spéciale comme dans l’ancien système, où le trône et l’autel s’appuyaient et se garantissaient mutuellement, mais du