Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 75.djvu/266

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tion et exportation réunies, a donné en apparence 154 millions de plus qu’en 1866; mais, si on tient compte de l’augmentation de l’importation des céréales par suite de la disette, — 235 millions contre 49, ce qui n’est pas un indice de prospérité, — on trouve que les chiffres significatifs de la balance du commerce extérieur en 1867 se traduisent par une différence en moins de plus de 50 millions sur 1866. Cette même année 1866 avait fourni une augmentation de 230 millions sur la précédente. En 1867, les revenus indirects sont également restés au-dessous de ceux de l’année précédente d’environ 2 millions[1]. Quant au portefeuille de la Banque de France, qui est bien le symptôme le plus caractéristique de l’activité du pays, ce portefeuille n’a fait que baisser de mois en mois, et la totalité des opérations d’escompte de l’année 1867 a été de 5 milliards 733 millions contre 6 milliards 574 millions en 1866. Les faits sont donc certains, il y a eu un temps d’arrêt bien réel dans le mouvement des affaires en 1867; mais, dira-t-on, comment ce temps d’arrêt, qui ne se manifeste après tout que par une diminution de 52 millions dans le chiffre du commerce extérieur, qui laisse encore les revenus indirects à peu près au chiffre de ceux de 1866, peut-il se traduire par une accumulation de capital disponible aussi considérable que celle qui existe aujourd’hui? Comment peut-il faire que l’intérêt soit descendu à 2 1/2 pour 100 et même au-dessous, et qu’il s’y maintienne depuis si longtemps?

Pour se rendre compte de l’influence que peut exercer un temps d’arrêt dans les affaires sur l’accumulation du capital disponible, il faut considérer quel est l’élément sur lequel on opère. Il y a dans la société une masse de capitaux qui restent toujours à l’état flot- tant : c’est la partie disponible de la richesse publique, celle qui est destinée à nous faire vivre pendant que nous produisons les choses qui doivent la remplacer ; ce sont, par exemple, le blé et le vin que nous consommons avant que les récoltes de l’année soient mises en vente, les étoffes que nous portons jusqu’à ce qu’on en ait fabriqué d’autres. Dans les jours de grande activité, lorsque rien ne chôme, cette partie flottante de la richesse est toujours employée, elle est même quelquefois insuffisante, ce qui fait qu’elle augmente de prix. Que faut-il pour que d’insuffisante elle soit tout à coup abondante? Il suffit qu’il y ait un ralentissement dans l’emploi. Supposons que cette partie disponible de la richesse soit de 50 mil-

  1. Il est juste de faire remarquer que certains impôts, tels qu’une portion du second décime de l’enregistrement et les droits de douane, de navigation, ont été supprimés à dater de 1867, et on suppose que sans cela l’augmentation aurait pu être de 20 millions; mais, même avec cette supposition, les revenus indirects n’en restent pas moins de 20 millions inférieurs aux prévisions du budget.