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sucre, le café, le thé, le tabac, les vins, les liqueurs, arrivent de l’extérieur par cette voie, La France tire de son territoire les principaux élémens de son alimentation. Depuis la réforme habile et heureuse d’ailleurs de son régime douanier, les matières premières destinées à l’industrie ayant été exonérées, il n’y a plus que deux articles de nature à présenter de gros chiffres : le café et les sucres coloniaux ou étrangers. Le produit du café est triplé depuis vingt ans, et la recette des sucres extérieurs, plus ou moins comprimée par la récolte du sucre indigène, est très variable. En somme, nos douanes ne rendront pas de longtemps beaucoup plus qu’on n’en tire aujourd’hui, et il ne faut pas s’en plaindre. Si les boissons donnent en Angleterre plus de 500 millions de francs, c’est que personne ne prétend à des exemptions. On ne recherche pas si un gallon de bière a été bu par le riche ou par le pauvre, à la campagne ou dans une ville : il suffit qu’il ait été consommé pour que le fisc exerce son droit. Nous possédons en France une richesse que nos voisins nous envient, le vin. Ce genre de production s’est développé d’une manière qui est un sûr indice des progrès de notre agriculture ; mais chez nous ce qui est imposé, ce n’est pas la consommation du vin, c’est le commerce auquel il donne lieu. Il semblerait que, si une cotisation de 20 centimes est demandée à celui qui boit un litre de vin, c’est qu’on cherche un moyen de le faire contribuer aux charges communes : peu importe qu’il soit ou ne soit pas propriétaire ; c’est en qualité de citoyen français qu’il devrait contribuer. Il n’en est pas ainsi. Par une des réminiscences féodales de la restauration qui a agencé notre impôt sur les boissons, le propriétaire est exonéré lorsqu’il consomme sur place, les taxes varient d’une localité à l’autre, et au moyen du droit de détail le plus lourd du fardeau est rejeté sur les plus pauvres. Les derniers documens nous apprennent que l’année 1865, exceptionnellement fertile, a rendu 60 millions d’hectolitres de vin, déduction faite des quantités qui ont été converties en eaux-de-vie et en vinaigre ; moins de la moitié de cette récolte, 25,279,845 hectolitres seulement, ont été atteints par les droits, et sur une somme de 118 millions environ que les vins ont produits plus de 50 millions ont été perçus en vertu du droit de détail dans les cabarets et auberges de nos campagnes, à proximité de quelque grand domaine qui ne payait rien. Ce droit de détail, qui a porté sur 6,893,300 hectolitres en 1847, année de détresse, n’a plus frappé que 6,210,882 hectolitres en 1865, année d’abondance. Il faut en convenir, de pareilles anomalies ne sont guère favorables à l’accroissement de l’impôt indirect. L’emploi du sel est limité ; le droit, totalement supprimé en Angleterre, ne dépassera jamais de