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nient même qu’aucun changement sérieux se soit produit avant 1560. Suivant elles, la dépréciation n’aurait commencé qu’à cette époque, pour continuer jusqu’en 1620 ou 1630; mais, quelle que soit la divergence d’opinion et sur l’importance de la dépréciation et sur le moment où elle a commencé, tout le monde est d’accord pour reconnaître que la grande révolution monétaire était accomplie vers le premier tiers du XVIIe siècle, environ cent quarante ans après la découverte de l’Amérique, et qu’il n’y eut plus de changement sérieux jusqu’à une époque rapprochée de celle où nous vivons. Or il est curieux de constater ce qu’a été la production des métaux précieux pendant l’époque où s’est accomplie cette révolution, et ce qu’elle a été depuis. M. Jacob, avons-nous dit, estime à 3 milliards 615 millions la production du XVIe siècle en entier; il porte à 10 milliards celle du XVIIe et, en supposant qu’un tiers en revienne aux trente premières années de ce siècle, c’est avec une production de 6 milliards, qui serait venue s’ajouter au milliard qu’on croit avoir existé auparavant, que le grand changement dans la valeur des métaux précieux se serait opéré. L’augmentation en quantité aurait été de 600 pour 100 et la dépréciation de 200 seulement. Il en résultait donc que la dépréciation du numéraire n’était pas nécessairement proportionnelle à la quantité dont il augmentait; mais ce qui a une signification plus grande encore, c’est la production qui suivit la révolution monétaire.

Le XVIIe siècle, selon M. Jacob, donna 10 milliards, soit 7 depuis 1630. Le XVIIIe en produisit, selon les évaluations les plus probables, 20, en tout 27 milliards qu’il faut ajouter aux 7 qui pouvaient exister vers 1630, c’est-à-dire une augmentation à peu près quadruple, et cependant, malgré cette augmentation, personne ne signale, jusqu’à la moitié du XVIIIe siècle, aucune autre dépréciation bien réelle sur les métaux précieux. On suppose seulement qu’aux environs de 1789 un nouveau changement eut lieu, et que la puissance de l’argent, que nous avons laissée de 2 à 1 en 1630, se rapprocha du pair, c’est-à-dire de la valeur qu’il eut en 1848. Encore y a-t-il quelques auteurs qui le contestent, et qui pensent que ce dernier changement ne s’est produit que dans la première moitié du XIXe siècle. Du reste, cette différence d’opinions n’a aucune importance, puisqu’en supposant la dépréciation la plus considérable nous trouvons encore que de 1630 à 1789 elle n’a été que de 100 pour 100, tandis que l’augmentation des métaux précieux aurait été de 400. Le même phénomène continue pendant la première moitié du XIXe siècle. On affirme que la production de ce siècle, jusqu’à la découverte des mines de la Californie, a dû être d’une dizaine de milliards, dont 8 au moins ont été importés en