Dobrinjatzk venait de passer le Danube avec le conseiller russe, adressait de son côté une supplique à Napoléon. De ces deux faits, le premier est connu depuis longtemps, le second n’a été mis en lumière que depuis quelques années.[1]. Or la coïncidence, est significative, Kara-George voit quelques uns-de ses adversaires mettre leur confiance dans les Russes ; lui, il se tourne vers Napoléon, qui venait de vaincre l’Autriche à Wagram (6 juillet 1809), et qui dans le palais de Schœnbrunn, préparait le traité de Vienne. « Sire, lui dit-il, vous êtes le libérateur et le législateur des nations. La nation serbe userait heureuse de recevoir, de votre majesté son salut et sa loi[2]. » Napoléon était l’allié de l’empire ottoman, d’autres intérêts d’ailleurs réclamaient ses soins, et il ne paraît pas qu’il ait daigné faire attention à cette supplique. Le député serbe qui n’avait pu se faire admettre à Schœnbrunn étant venu à Paris l’année suivante, M. de Champagny ministre des affaires étrangères écrivait à l’empereur le 25 mai 1810 : « Je n’ai pas jugé convenable d’avoir des rapports avec lui avant que votre, majesté l’eût permis. Je l’ai mis en rapport avec un chef, de mes bureaux, et j’ai l’honneur de soumettre à votre majesté le précis d’un entretien que le député. serbe a eu avec ce chef et les différentes pièces relatives à son mémoire[3]. » La Russie au contraire avait mille raisons pour répondre à l’appel de Pierre Drobrinjatz ; on s’étonne même qu’elle ne l’ait point devancé. Au mois d’août 1809, tandis que le messager du « commandant des Serbes » faisait route vers Schœnbrunn, quelques
- ↑ Voyez Recueil des traités de la Porte ottomane avec les puissances étrangères, par le Baron de Testa. Paris 1865, Tome II, page 331.
- ↑ La lettre originale, en lange serbe, est conservée aux archives de l’empire. En voici la traduction latine officielle inscrite sur le verso.
« Majestas tua imperialis !
« Gloria armorum et facorum majestatis tuæ imperalis replevit orbem universum. Nationes in augustissima tua persona suum liberatorem et legislatorem suscipiunt ; hujus felicitatis particeps esse cupit serbica natio. Monarcha ! respire Slaveno-Serbos, quibus nec virtus bellica, nec fides erga benefactorem deest… Tempus et occasio hanc veritatem demonstrabunt, unaque id quod digni sint protectione magnæ nationis.
« Spe fretum firmissima digneris, augustissime imperator, altissimo responso consolari
« Majestatis tuæ imperialis
humilimum et fidelissimum servum
KARA-GEORGIUM PETROVITCH
Antistitem nationis Serbicæ »
Belgradi, 16 augusti - ↑ On lit en marge de cette lettre : le tout, a été renvoyé au ministère. (Voyez Testa, Recueil des traités de la Porte ottomane, page 331.) Il faut ajouter sans doute : renvoyé, purement et simplement. On ne trouve en effet aucune réponse à cette lettre de M. de Champagny dans la Correspondance de Napoléon Ier.