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poursuite. Que feront-ils? Personne ne veut croire François si zélé pour les hérétiques. « Le roi a aussi mauvais conseil qu’il est bon, » dit un jour en plein parlement[1] le doyen de la faculté de théologie. C’est l’opinion commune. François est au fond du cœur trop bon catholique pour s’intéresser à Berquin; il n’a pu signer l’ordre transmis aux délégués qu’en cédant aux mauvais conseils de Marguerite. Il serait donc opportun de lui donner un avertissement en continuant le procès qu’il a dit d’interrompre. S’il se fâche, sa colère, si vive qu’elle soit, tombe vite, et avant son retour à Paris se succéderont bien des jours, peut-être bien des mois. Tout cela considéré, le président Charles de Guillard répond fièrement aux délégués que, sur un commandement contenu dans une lettre-missive, la cour ne sursoit jamais. Il faut en conséquence suivre l’affaire en attendant l’envoi d’une lettre-patente.

Les délégués, cet avis exprimé, se retirent et vont se remettre à leur enquête sur les méfaits de Berquin. Après cet incident, il en survient un autre. Berquin, qui connaît ses juges, les récuse. Que vaut cette récusation? Il l’ignore; mais, comme il ne peut plus rien espérer que d’un ajournement, il cherche à faire ajourner son procès. On le comprend, et, pour déconcerter sa manœuvre, on se presse. Le 27 février, il est mandé devant le parlement. Il faut qu’il déclare les motifs de sa récusation pour qu’on la rejette. Le président Charles de Guillard, sieur des Épichelières, un Manceau rusé, l’interroge. Berquin répond qu’il désire exposer par écrit tous ses motifs, qui sont nombreux et graves, et demande pour cela quelque délai. — A tout délai, reprend Guillard, il faut assigner un terme. Combien de jours veut-il? — Il ne peut le dire; on lui refuse en effet tout moyen de hâter sa besogne, même un secrétaire, quand il demande pour secrétaire, sinon le jour, du moins la nuit, le greffier même du tribunal. Autant qu’il est possible, il se pressera. — Qu’il se presse donc, lui répète Guillard; néanmoins, en attendant qu’il ait achevé ses écritures, une autre question se présente, qui peut être sur-le-champ résolue. Il a parlé d’introduire un appel. Qu’a-t-il voulu dire ? S’il a quelque abus à reprocher aux Relégués du pape, on l’écoutera; mais qu’il n’ait pas l’intention d’appeler à d’autres juges : depuis la bulle, il n’y en a plus d’autres pour les hérétiques. Qu’il s’explique donc; la cour va l’entendre et statuer. — Sur ce point même, Berquin demande à réfléchir. On lui donne pour délai la fin du jour et la nuit; le lendemain, il sera de nouveau mandé devant la cour.

Il comparaît en effet le lendemain et puis le 4 mars 1526; mais

  1. Séance du 16 août 1526.