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Mme DE ROCHEFORT
SA FAMILLE ET SES AMIS

II.
LE MARQUIS DE MIRABEAU ET LE DUC DE NIVERNOIS

Nous avons esquissé la vie et les relations de Mme de Rochefort depuis sa première jeunesse jusqu’au moment où commence la correspondance inédite que nous avons sous les yeux[1]. Dans cette correspondance apparaissent des personnages nouveaux, dont le plus original assurément est celui qui nous l’a conservée, c’est le marquis de Mirabeau, le père du fameux orateur. Il ne connut Mme de Rochefort qu’en 1754, après la périnée brillante des réceptions et des représentations de l’hôtel Brancas. Ce fut le duc de Nivernois, avec lequel il était lié dès leur première jeunesse à tous deux, qui l’introduisit dans le salon de son amie. Le charme extrême de cette personne d’un esprit si animé, si naturel et si fin, d’un caractère si loyal, si affectueux, si doux, si résigné dans les souffrances[2], agit d’autant plus puissamment sur l’auteur de l’Ami des Hommes qu’il était lui-même fort peu endurant de sa nature et de plus marié à une femme très propre à lui faire sentir le prix et la difficulté de la patience. Ses amis, suivant lui, l’appelaient Mme Xantippe. Aussi est-il intarissable dans son admiration pour la

  1. Voyez la Revue du 1er février.
  2. Elle était alors presque toujours malade ; cet état se prolongea neuf ou dix ans. Elle l’explique d’une manière assez délicate et assez élégante pour que nous lui empruntions ses expressions, « Je suis, écrit-elle en 1782, à quarante-six ans, un peu impatiente d’avoir tant de peine à parvenir à la perfection de mon âge. »