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lesquels, pour un atome de carbone de plus, on trouve une addition de deux atomes d’hydrogène, de telle sorte que leur formule générale est CnH2n+2. M. Kékulé expliquait comment dans ces conditions ces gaz étaient tous saturés. Chaque atome de carbone se soude à son voisin. Il en résulte une chaîne dans laquelle tous les atomes intermédiaires demeurent en possession de deux atomicités ; ceux qui se trouvent aux deux bouts, et qui n’ont par conséquent de voisin que d’un côté, conservent seuls trois atomicités. Que toutes les atomicités libres soient saturées par de l’hydrogène, et l’on trouve la série dont parlait M. Kékulé. C’est la série des hydrocarbures les plus riches en hydrogène que l’on connaisse. Ces composés sont entièrement satisfaits et doivent à cette circonstance une extrême stabilité.

Nous savons cependant, — c’est une notion qui nous a été précédemment acquise, — qu’un atome d’hydrogène pourra être remplacé par un corps différent. Qu’arrivera-t-il dans ce cas de substitution ? Si l’atome d’hydrogène est remplacé par un corps monatomique, la molécule restera saturée, l’équilibre ne sera pas troublé ; mais s’il est remplacé par un corps diatomique (élément ou radical composé), le nouveau-venu conservera une atomicité libre : il laissera ainsi la molécule à l’état incomplet, ou bien il la complétera en entraînant un nouveau corps dans la combinaison. On voit comment l’atomicité intervient pour expliquer l’état stable ou instable des molécules. On voit en même temps comment les molécules organiques s’accroissent non-seulement par du carbone qui se soude à du carbone, mais aussi par de l’oxygène, par de l’azote, par des radicaux composés, qui entraînent à leur suite un nouveau cortège d’atomes. On comprend sous quel jour se présentent maintenant les réactions chimiques. Les molécules saturées se modifient par substitution ; les molécules incomplètes, celles qui conservent des atomicités libres, ont une tendance à se compléter et se modifient par addition.

Le point de vue où nous sommes parvenus est tout à fait général, et comprend à la fois la chimie minérale et la chimie organique ; on ne saurait plus marquer où l’une finit, où l’autre commence. Les mêmes principes expliquent les modifications des molécules organiques et des composés minéraux. Dans les pages qui précèdent, nous n’avons guère mentionné que l’hydrogène, l’oxygène, l’azote et le carbone, c’est-à-dire les quatre élémens qui constituent plus spécialement les matières organiques. Tous les autres élémens peuvent venir se ranger à côté de ceux que nous avons déjà plus particulièrement considérés. L’atomicité n’est point une propriété spéciale de l’hydrogène, de l’oxygène, de l’azote, du carbone. On