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des partisans. La plus récente de toutes celle des quakers, le professait presque ouvertement. En religion comme en politique régnait une tendance à la transaction. Le roi n’en était pas éloigné. Il avait secrètement embrassé le catholicisme avec dispense de le pratiquer. Il suivait le culte anglican et n’y croyait pas ; au fond, il ne pratiquait que l’indifférence. Il l’encourageait par son exemple, et, grâce à lui, le libertinage, dans quelque sens qu’on entende le mot, dominait à la cour. Les mondains et la plupart des politiques confondaient la foi avec le fanatisme et considéraient le zèle religieux comme une passion révolutionnaire. C’était assez l’avis de Charles II, et il en soupçonnait les sectes séparées de l’église anglicane. Celle-ci était une institution monarchique ; à ce titre, il devait la protéger ; mais bien des dissidens aussi, surtout les presbytériens étaient royalistes, et moyennant de faibles concessions se seraient ralliés à l’église. L’épiscopat, se croyant vainqueur avec les Stuarts, n’en voulut faire aucune ; et la royauté, essayant quelquefois de la tolérance pour en faire jouir l’es catholiques, revenait le plus souvent, par goût pour l’autorité, à l’intolérance plus politique que religieuse de la haute église. Des lois oppressives ou tout au moins vexatoires rétablirent en principe l’uniformité, épurèrent le clergé, et forcèrent à une séparation définitive toutes les sectes dissidentes, qui formèrent sous le nom général de dissent un ensemble de disgraciés et de mécontens. C’était un puissant renfort envoyé au parti des libertés politiques. Jacques II, après mainte hésitation, voulut changer tout cela. Franchement catholique, il s’aliéna l’église et chercha par compensation à regagner le dissent. Il ne réussit qu’à se faire accuser de favoriser indirectement le papisme. Il eut bientôt tout le protestantisme contre lui, et la révolution de 1688 fut faite.

Elle rétablissait la liberté, et Guillaume III l’aurait voulue pleine et entière pour toutes les consciences. Forcé de ménager les préjugés de son parti, il ne put, au lieu de comprendre tous les cultes sous une protection commune, établir qu’une tolérance générale ; l’église s’y résigna, le dissent s’en contenta. Bien qu’il continuât de renfermer dans son sein de plus strictes croyances et un zèle plus fervent, il s’était de jour en jour calmé. L’enthousiasme des premiers temps avait disparu ; la foi en s’élargissant s’était affaiblie ; la science et le talent étaient en déclin dans ses rangs, le nom même de certaines sectes se perdait. D’un autre côté l’église, dès longtemps arminienne en majorité, c’est-à-dire modérée en théologie, s’ouvrait peu à peu aux idées libérales. La monarchie lui donnait l’exemple, et un mouvement intellectuel, né dans les universités, et qu’on attribue aux écrivains connus sous le nom de platoniciens de Cambridge, avait fait) pénétrer jusque dans l’épiscopat