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existence, c’est-à-dire l’établissement de l’anatomie générale comparative. Dans ce vaste champ, et si peu exploré avant lui, de la comparaison histologique, M. Robin a recueilli de précieuses vérités pour l’ensemble de la biologie.

Nous avons vu que les tissus normaux de l’organisme se composent d’un élément anatomique fondamental et d’un certain nombre. d’élémens accessoires. L’art médical a tiré de la découverte de cet ordre de faits des lumières complètement inattendues. Les travaux des micrographes modernes et principalement de MM. Hannover, Lebert, Virchow, Robin, Broca, Follin, etc., ont établi en effet que toutes les productions morbides et en particulier celles qu’on connaît sous les noms de tumeurs, de kystes, de polypes, de cancers, de squirrhes, de tubercules, etc., proviennent tout simplement de la formation surabondante, excessive, de l’un de ces élémens accessoires. Il est démontré aujourd’hui que ces néoplasies, d’une apparence si souvent repoussante et où se dissimulent les germes de la mort, ne renferment rien d’étranger à l’organisme sain et ne sont caractérisées par aucune substance spéciale née sous l’influence de la maladie. Elles sont dues tantôt à l’hypergenèse, c’est-à-dire à une agglomération extraordinaire de tel élément accessoire participant à la composition normale du tissu où elles se développent, tantôt à l’hétérotopie de tel autre élément, c’est-à-dire à l’apparition de cet élément, là où il ne se produit point d’ordinaire. Le cancer par exemple, l’affreux cancer qui envahit et qui ronge est constitué uniquement, — qui l’aurait cru ? — par un développement exagéré de cellules épithéliales identiques à celles de notre épiderme, ou n’en différant que par des particularités dont l’origine s’explique aisément. La phthisie, ce fléau terrible qui décime notre espèce, est causée par le développement d’une matière dite tuberculeuse, composée de noyaux épithéliaux et embryoplastiques devenus granuleux et graisseux et mélangés à des corps fusiformes, tous élémens qui se trouvent dans l’organisme normal. Le poumon est ainsi envahi et détruit par des productions d’un aspect caséeux nées sous l’influence de la même loi que les productions normales, mais dans d’autres conditions. L’hétérotopie nous révèle d’autres phénomènes non moins singuliers. On a trouvé dans l’ovaire des kystes contenant à leur paroi intérieure un véritable derme pourvu de papilles, d’épiderme, de follicules pileux, de poils et de glandes sudoripares. On a même vu des dents se développer dans l’abdomen. Tous ces organes sont nés accidentellement dans ces régions, y ayant trouvé réunies par un concours fortuit les circonstances favorables à leur apparition. M. Robin a observé au voisinage de certaines glandes du corps la formation de petites masses composées entièrement de tissu identique à celui de la mamelle. D’autre part, les expériences récentes de M.