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suivait les métamorphoses de l’ovule et de l’embryon, et reconstituait. l’embryogénie. Laurent à la Monnaie étayait ses spéculations chimiques d’expériences capitales et minutieuses. Solitaire, mélancolique, découragé par l’insuccès de ses doctrines, il achevait dans son obscur laboratoire ces belles séries de découvertes qui l’ont illustré. Gerhardt, esprit supérieurement trempé pour la recherche et pour la généralisation, vivait péniblement du produit de quelques leçons particulières, tout en étant d’un unanime accord le premier chimiste de son temps. Il faisait alors ces travaux d’où sont sorties plus tard la théorie des types et celle de l’atomicité. Sénarmont à l’École des mines poursuivait avec l’habileté si délicate qui le caractérisait ses observations de cristallographie optique et ses expériences de synthèse minéralogique. M. Wurtz à l’École de médecine appliquait son talent d’investigation et d’interprétation aux grandes questions de chimie pure, et créait les ammoniaques composées. Foucault allait faire sa célèbre expérience du Panthéon. Le laboratoire particulier de M. Robin était le foyer des études microscopiques et le lieu des plus belles découvertes sur la structure intime des êtres vivans.

M. Robin continua cet enseignement jusqu’au jour où, une chaire d’anatomie générale ayant été créée pour lui à l’École de médecine, il put le donner sous une autre forme à de nombreux élèves, jaloux de faire connaissance avec un ordre de notions dont ils n’avaient qu’entrevu jusqu’alors les lumineux horizons. A la même époque (1862), un laboratoire nouveau fut mis par la Faculté à sa disposition, et ce laboratoire est devenu le centre de recherches actives inspirées presque toutes par le maître. Les jeunes savans qui ont fait là leur apprentissage ont déjà conquis dans la science une belle notoriété et plus d’une fois reçu les couronnes de l’Institut. M. Robin est d’ailleurs pour eux le conseiller le plus sûr en même temps que l’ami le plus bienveillant. Il est toujours prêt à éclairer et à guider ceux qui le consultent. La collection des thèses soutenues à l’École de médecine en est une preuve convaincante. On y voit l’influence considérable que ses travaux et ses ouvrages ont exercée sur les études, le salutaire bénéfice tiré de l’application de ses méthodes et le fruit excellent que portent toutes les œuvres où l’esprit d’abstraction est associé dans une juste mesure à celui de la recherche concrète. On n’estime généralement pas à sa vraie valeur, au point de vue des intérêts de la science, le patronage actif des maîtres.

L’heure où l’on commence à vivre des souvenirs du passé plus que des espérances de l’avenir, à songer à la besogne accomplie plus qu’à en projeter de nouvelle, ne semble pas être encore arrivée