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Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 89.djvu/201

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il remettait au conseil dès ministres un plan général de tous les travaux à entreprendre ; les questions d’art, débattues depuis si longtemps par les plus hautes autorités militaires, n’étaient plus difficiles à résoudre. C’est le plan qui a été en effet exécuté sous la direction supérieure du maréchal Dode de la Brunerie, ayant sous ses ordres le général (maréchal) Vaillant et quelques-uns des officiers les plus distingués de l’arme du génie, parmi lesquels figurait à juste titre le chef de bataillon de Chabaud-Latour, qui, devenu depuis général de division, commande maintenant l’arme du génie dans l’ensemble de ce vaste système de défenses, qu’il a contribué à édifier. Ce sera toujours un véritable titre d’honneur pour le ministère de M. Thiers d’avoir décidé sous sa responsabilité l’exécution de ces ouvrages, qui sont appelés aujourd’hui à rendre de si incomparables services à la France.

Le plan général de l’œuvre a été, sauf quelques modifications peu apparentes, mais d’une importance réelle, conçu d’après le système de Vauban, auquel l’arme du génie en France est restée attachée avec une sorte de respect filial. C’est, comme chacun sait, le bastion ou, pour mieux dire, le front bastionné, qui est l’âme du système. Une ville, un lieu quelconque étant donné à fortifier, l’ingénieur commence par l’entourer d’un polygone d’un certain nombre de côtés, suivant la grandeur de la place, et, devant chacun des angles de ce polygone, il construit un ouvrage en forme de fer de lance, de losange, qui est le bastion proprement dit. La pointe de la lance qui s’avance plus ou moins à l’extérieur, plus quand les bastions sont peu nombreux et éloignés les uns des autres, moins quand les bastions sont plus rapprochés, la pointe de la lance s’appelle le saillant. Les deux côtés du fer dont la réunion forme la pointe prennent le nom de faces, et les deux autres côtés celui de flancs, mais ils ne se confondent pas : ils laissent entre eux, sur l’angle du polygone, un espace nécessaire au service du bastion, et que l’on qualifie de gorge ouverte ou fermée, selon les circonstances locales, fermée le plus souvent par des travaux passagers lorsqu’on prévoit l’assaut du bastion. Quant aux côtés du polygone qui relient entre eux les divers bastions, on les. désigne sous le nom de courtines. Si maintenant on essaie de dessiner la figure que nous venons de décrire, on verra, en tirant sur chacune des lignes qu’elle présente des perpendiculaires simulant le feu de la partie de l’artillerie qui arme les remparts de tous les élémens composans, que le point fort d’une place, c’est la courtine, qui est couverte par trois lignes de feux, et que le point faible, c’est le saillant du bastion, qui ne se défend pas directement lui-même, et n’est véritablement protégé que par les canons des faces des deux bastions voisins de droite et de gauche, lesquels viennent croiser leurs feux en avant du bastion attaqué, mais en dessinant à peu de distance de son saillant un angle que ne couvre pas l’artillerie de la