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Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 89.djvu/742

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de ce système d’administration des dépenses considérables pour l’état et un impôt énorme pour les particuliers sans résultats utiles. » L’ancienne administration des haras, — et on ne peut s’en étonner après avoir lu cette appréciation, — fut supprimée en 1790. Les guerres de la république et de l’empire, les réquisitions de chevaux qui en étaient la conséquence, la perturbation des affaires à la fin du siècle dernier, ne pouvaient pas favoriser la production chevaline. Ce fut encore par la réorganisation des haras que l’empire voulut l’encourager, et il reconstitua cette administration en 1806. « Napoléon, raconte un contemporain, sentit la nécessité de recréer dans l’intérêt de l’agriculture et des remontes militaires ce que l’on avait détruit avec si peu de prévoyance dans le paroxysme de la fièvre révolutionnaire ; il donna l’ordre à son ministre de l’intérieur de rétablir les haras, de les constituer de la manière la plus avantageuse et de les confier à une administration sage et active, afin d’accélérer les résultats dont sa prévoyance lui faisait sentir l’indispensable nécessité. Il fit acheter des étalons, il en dépouilla les pays conquis ou envahis, et en envoya un grand nombre en France, qu’il distribua dans les anciens établissemens et dans de nouveaux dépôts. » Quel a été l’effet de la nouvelle administration ? Voici de quelle manière l’appréciait vingt ans après un ancien émigré devenu pair de France et tout à fait bien disposé envers son roi et les institutions de l’époque. Après avoir comparé les ressources en chevaux de la France de 1825 à celles de 1810, il ajoute : « D’après des faits aussi positifs qu’il est facile de vérifier, pourrait-on encore douter de l’urgente nécessité de sauver la France de la stérile et desséchante administration des Haras ? » — Les contemporains qui se sont occupés de la production chevaline n’ont pas oublié les critiques acerbes dont l’administration des haras a été l’objet de 1830 à 1850 ; il est inutile d’en rappeler les termes. C’était le thème principal des discussions au congrès central d’agriculture, Si on l’a laissée tranquille de 1850 à 1869, on sait pourquoi, et l’on n’a pas oublié qu’elle a essuyé les premières critiques aussitôt que le droit d’examen a été rendu au pays. L’administration des haras n’a jamais rendu les services qu’on en attendait. Est-ce sa faute ? Elle a si souvent changé de mains, tant de systèmes ont été essayés, qu’elle aurait bien fait, au moins une fois, si cela eût été possible. D’autre part, on lui imposait une mission qui ne peut pas être remplie. L’administration des haras ne saurait porter la responsabilité des mécomptes qu’ont éprouvés les producteurs de chevaux de luxe, de chevaux de selle. La dégénération des anciennes races, la disparition, pourrait-on dire, de quelques-unes ne peut, ni dans un cas ni dans l’autre, être attribuée au gouvernement. Elle provient de ce que les bons chevaux coûtent très cher à