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L’ARTILLERIE DEPUIS LA GUERRE.

ligne, si l’on avait pu les servir et les atteler, 3,000 canons de bataille ou 500 batteries de 6 pièces, chiffres correspondans à une armée de 750,000 combattans, à raison de 4 bouches à feu par 1,000 hommes. À ce nombre de 3,406 canons de campagne, il faut ajouter 581 canons rayés de montagne également pourvus de tout l’attirail correspondant, ce qui portait le nombre total des bouches à feu rayées de bataille à 3,987. On s’expliquera maintenant par ces chiffres comment, malgré la perte de toute l’artillerie de l’armée du Rhin et celle du 12e corps formée au mois d’août et prise à Sedan, malgré l’occupation des grands arsenaux de Strasbourg et de Metz, le gouvernement de Tours a eu l’agréable surprise de constater qu’il y avait encore des canons dans les provinces non envahies par l’ennemi, et comment dans Paris cerné, réduit à lui-même, il s’est dès le premier jour trouvé assez de matériel de campagne pour composer deux fois autant de batteries qu’il était possible d’en utiliser.

Si l’on demandait pourquoi, avec 164 batteries de personnel organisées, l’artillerie possédait 500 batteries de matériel rayé de campagne et 90 batteries de matériel rayé de montagne, on répondrait qu’il est nécessaire d’avoir en réserve ce qui ne peut être improvisé, et que la dangereuse parcimonie de la chambre, tout-puissante à l’égard du personnel entretenu, est impuissante à mal faire vis-à-vis de la sévère et minutieuse économie qui est dans les traditions et les habitudes du corps de l’artillerie. En effet, malgré la dérisoire allocation de 320,000 francs annuellement accordée par le budget pour la transformation de l’artillerie de campagne lisse en artillerie de campagne rayée, allocation à peine suffisante pour remplacer les canons, les voitures et les affûts usés, comme les munitions consommées dans les exercices des troupes, l’artillerie trouvait moyen, en faisant flèches de tout bois, d’augmenter notablement chaque année son matériel rayé aux dépens de l’ancien matériel lisse, qui lui-même, en attendant, constituait une réserve respectable pour des troupes de seconde ligne. Au 1er juillet 1870, cette artillerie lisse de campagne se composait encore de 5,379 canons et obusiers, avec 3,554 affûts et 4,627 caissons à munitions, nombres correspondans à la composition de 360 batteries de 6 pièces au moins. Les canons de cette catégorie étaient et sont journellement rayés, et c’est avec les canons-obusiers de 12, dont l’on a depuis 1867 étudié la transformation en canons se chargeant par la culasse, que l’on obtient ces canons de 7, qui ont salué pour la première fois les Prussiens, dans la journée du 30 novembre, du haut du plateau d’Avron, où ils étaient en position.

Quant au gros matériel destiné au service des sièges, des places