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tions de ce genre fut la conversion des rentes 5 pour 100 en rentes 4 1/2, ordonnée par le décret du 14 mars 1852. Cette novation de la dette publique, parfaitement légitime d’ailleurs, réduisit d’une somme de 17,566,401 francs le chiffre des arrérages annuels que le trésor avait à payer aux rentiers. Le résultat heureux de la première conversion donna dix ans plus tard l’idée d’en tenter une seconde. M. Fould venait d’arriver au ministère des finances en inscrivant sur son programme : « ni emprunt, ni augmentation d’impôt. » Il n’avait pas prévu, en faisant cette déclaration téméraire, les circonstances dans lesquelles il ne tarda pas à se trouver. L’expédition du Mexique, engagée légèrement et considérée d’abord comme une entreprise de peu d’importance, avait pris de jour en jour des proportions plus sérieuses, et obligeait à de vrais sacrifices. Les armemens étaient devenus considérables, et les frais nécessités par l’entretien d’une armée de 50,000 hommes à des milliers de lieues dérangeaient tous les calculs du ministre. Il lui fallait absolument trouver des ressources. Il espéra y réussir, sans être infidèle à son plan, en faisant décider la conversion des rentes 4 1/2 pour 100 en rentes 3 pour 100. Cette conversion, à la différence de la première, ne pouvait être que facultative. On n’avait eu le droit d’obliger les porteurs de 5 pour 100 à échanger leurs titres que parce qu’on leur avait laissé le choix entre l’acceptation des conditions de l’état ou le remboursement ; mais il n’en était plus de même en 1862. On ne pouvait offrir le remboursement au pair des rentes 4 1/2 et 4 pour 100. On renonça donc à tout moyen de contrainte, et l’on eut recours à la persuasion. On entreprit de convaincre les propriétaires des rentes 4 et 4 1/2 qu’ils avaient avantage à payer au trésor une soulte pour continuer à jouir du même revenu, qu’ils auraient à supporter, il est vrai, un léger sacrifice, mais qu’ils le regagneraient largement par l’amélioration certaine de leur capital dans l’avenir. La soulte fut fixée à 5 fr. 40 cent, pour 4 fr. 50 cent, de rentes 4 1/2, et à 1 fr. 20 cent, pour 4 fr. de rentes 4 pour 100. Une partie des rentiers, notamment les villes et les établissemens de bienfaisance, se laissèrent prendre aux séductions ministérielles et consentirent à la conversion ; mais les autres firent la sourds oreille en gardant leurs rentes. Il resta ainsi 40 millions de rentes 4 1/2 et 500,000 francs de rentes 4 pour 100. Le résultat de l’opération fut un bénéfice net de 158 millions au profit du trésor. Pour ce maigre avantage, on avait augmenté le chiffre nominal de la dette publique d’une somme considérable, on n’avait pas allégé ; d’un centime les charges de la rente, on avait diminué les revenus des hospices et des communes, enfin on n’avait pu atteindre le but avoué de la conversion, l’unification de la dette.

La soulte de 158 millions ne fut pas le seul partie que le ministre