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LE BOMBARDEMENT


DE PARIS




I.

On se souvient de l’attention mêlée d’étonnement qu’excitèrent à l’exposition universelle de 1867 les produits métallurgiques de M. Krupp, dont l’usine est établie à Essen, dans la Prusse rhénane. Il y avait là des blocs d’acier du plus formidable modèle ; le métal était compacte, homogène, à grains fins, brillans, bien serrés, bien fondus. Tous les métallurgistes s’arrêtaient devant ces échantillons ; mais ils les connaissaient de longue date, et déjà dans les précédentes expositions universelles, en 1855 à Paris, à Londres en 1862, ils avaient pu les admirer. Les artilleurs eux-mêmes avaient applaudi aux merveilleux essais de M. Krupp, et plusieurs fois ils avaient remarqué ses gros canons d’acier, dont quelques-uns se chargeaient par la culasse. Le métal employé, le mode de chargement, les dimensions énormes adoptées pour la pièce, étaient autant de nouveautés.

En 1867, la Prusse ne s’était pas contentée d’exhiber ses produits métallurgiques. Sûre que l’exploitation des mines est en même temps que l’agriculture un des principaux élémens de la richesse territoriale d’un peuple, elle avait pris plaisir à nous faire connaître, sous une forme parlant à l’œil, les étonnans progrès de ses exploitations souterraines, surtout pour le minerai de fer et le charbon, qui tous les deux interviennent si grandement aujourd’hui dans la défense des états. Sous l’aspect de cubes empilés les uns sur les autres, correspondant chacun à une période de temps donnée et représentant le poids ou la valeur des matières extraites, la Prusse indiquait aux plus ignorans quelle marche prodigieuse elle avait suivie depuis le commencement de ce siècle dans les arts industriels, car les