Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 91.djvu/49

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rie centrale, et on voit bien qu’elle aurait pu sans inconvénient ne pas exister. Au contraire les vingt mairies sont devenues autant de centres d’activité patriotique. Le ministre de l’intérieur du 4 septembre avait par malheur commis à la hâte plusieurs mauvais choix. Dans chacun des arrondissemens, les élus politiques de 1869, élus alors avec le secours des partis les plus exaltés et prévoyant des réélections prochaines, s’étaient empressés d’installer aux mairies les grands meneurs de ces partis. — Qui t’a fait maire ? — Celui que j’ai fait gouvernement. — Il n’y avait guère d’autre raison à la présence dans les mairies de tels ou tels citoyens chargés, sous l’écharpe tricolore, de former les bons ménages, de répandre l’instruction, d’assister les pauvres et d’armer les citoyens. L’élection du 6 novembre a gardé les bons maires et remplacé presque tous les mauvais. Il était temps, car depuis ce moment la besogne municipale est devenue un tour de force de dévoûment et d’activité. Entrez dans une mairie, c’est la place publique : les gardes nationaux vont chercher des armes, les électeurs se font inscrire, les élections de compagnie s’accomplissent, les postes se succèdent, les femmes demandent des vivres ; les bouchers, les boulangers, les cantiniers, les marchands, viennent recevoir des ordres ; les comités de bienfaisance, d’écoles, de quêtes, de mutualité, d’ambulance, se réunissent ; le maire et les adjoints, assistés des meilleurs citoyens et de nombreuses mouches du coche, accessibles tout le jour aux demandes, aux gémissement, aux conseils, aux importunités, aux importances du premier et du dernier venu, nagent au milieu de ces flots humains sans perdre un instant ni le sang-froid de la tête, ni la compassion du cœur. Telle est la journée des meilleurs maires, le spectacle des meilleures mairies ; je me tais sur les mauvaises. C’est assez prouver que les élémens de la vie municipale se groupent d’eux mêmes autour des mairies, que chaque arrondissement est une ville, et que Paris, comme la France, a besoin de décentralisation.

Cependant il y a des intérêts centraux ; quels sont-ils ? Faire nettement ce partage, c’est indiquer la future organisation de Paris. Les affaires qui ne peuvent pas être décentralisées sont la police, les travaux publics, les recettes et les dépenses ; tout le reste, assistance, écoles, élections, garde nationale, peut être à peu près complètement décentralisé.

La police, dans le lieu où réside le gouvernement, doit évidemment appartenir au gouvernement et être faite aux frais de l’état, sauf un abonnement à voter par la ville pour la police municipale, ce que l’on peut appeler la police de salubrité à côté de la police de sécurité. Les travaux publics, les grands percement, les grands édifices, les grands hôpitaux, les grands services des eaux, de l’éclairage, etc., ne peuvent être décentralisés, et comme l’état entre dans