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Mons : on rapportait que des canons avaient été pris par nous, et qu’une partie de l’armée du prince royal était en complète déroute. Quelques escarmouches de francs-tireurs, surtout des éclaireurs Mocquart dans le nord de Seine-et-Oise, et de quelques rares bandes de paysans, c’étaient là les épisodes obscurs et insignifians que travestissait la renommée. En réalité, les colonnes prussiennes qui chevauchaient ainsi aux environs de Paris étaient numériquement faibles : elles n’allaient pas tarder cependant à devenir considérables et à pénétrer plus avant au cœur de la France.

Le point stratégique qui devait devenir l’objectif des efforts de l’invasion, c’était Orléans, ville riche, commerçante, la clé de la Beauce, et position d’une importance presque sans égale, dominant la Loire au point culminant de son cours, assise en outre sur trois chemins de fer. Dès le commencement de la campagne et avant leurs succès, les Allemands avaient fait explorer cette contrée avec un soin minutieux, si du moins il faut en croire le procès de l’officier prussien Hardt, arrêté à Gien comme espion et fusillé à Paris. Trois routes principales conduisent à Orléans de l’est et du nord-est de la France. L’une, partant de Troyes, passe par Sens et Montargis : c’est celle qui fut suivie par le prince Frédéric-Charles après la prise de Metz ; elle laisse sur la droite les localités de Ladon, Mézières, Beaune-la-Rolande, désormais mémorables par d’acharnés combats. La seconde route part de Fontainebleau, passe par Malesherbes et Pithiviers. La troisième, qui est aussi la plus importante, vient de Paris, suit la ligne ferrée, traversant Etampes, Toury, Artenay, et laissant à droite le champ de bataille de Patay. De ces trois routes, on ne sut d’abord laquelle serait suivie par les Allemands ; elles paraissaient presque également menacées. L’on annonçait, à la date du 23 septembre, que des troupes prussiennes considérables étaient à Fontainebleau, et qu’elles se dirigeaient sur Orléans par Malesherbes et Pithiviers. Cette dernière ville fut en effet visitée à cette époque par des uhlans. D’autre part, on signalait des cavaliers ennemis sur la route de Montargis. Le danger néanmoins ne devait pas venir de ce côté. Les forces que les Prussiens lancèrent contre Orléans furent détachées, non pas des armées de l’est, mais de l’armée d’investissement de Paris. Elles se composèrent d’abord de la division de cavalerie du prince Albrecht avec une faible colonne d’infanterie et quelques canons. Quant à nous, nous avions constitué à Orléans un petit corps d’armée sous le commandement du général de Polhès. C’est aux environs d’Artenay, où s’opère la jonction de la route d’Orléans à Paris et de la route de Chartres à Orléans, qu’eurent lieu les premiers combats de quelque importance. La cavalerie y joua le plus grand rôle de part et d’autre ; le 6e dragons, le 6e hussards, quelques com-