Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 92.djvu/569

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

signalées dans la peste de Londres en 1664, et qu’un peu de sang dans les matières rendues par l’intestin est un bon pronostic, comme dans la peste de Montpellier. Il disait, après avoir énuméré les principaux symptômes de la peste : « En comparant ces symptômes avec ceux de l’épizootie, on trouvera une analogie parfaite ; les tremblemens, les frissons, la pesanteur de la tête, la difficulté de la respiration, les changemens et l’inconstance des évacuations abdominales, les variations dans les éruptions critiques, offrent la même marche, les mêmes dangers à l’observateur et les mêmes conséquences au praticien. » Les vomissemens sont un des caractères de la peste de l’homme. Le bœuf ne vomit pas, c’est une conséquence de son organisation ; mais n’y a-t-il pas chez ceux qui sont affectés de l’épizootie des envies de vomir ? C’est ce que nous nous demandions en analysant les mouvemens de l’encolure et de la tête chez quelques animaux au marché de La Villette. Ce serait une ressemblance de plus entre la peste bovine et la peste de l’homme. Du reste Vicq-d’Azyr avait observé chez les animaux malades de petites convulsions, surtout au cou.

Jusqu’à ces derniers temps, on s’était persuadé que la peste bovine n’attaquait que les individus de l’espèce bovine. Cependant Sauvages avait remarqué l’épizootie de 1745 sur la chèvre et le mouton dans le Vivarais ; Grognier la signale sur la chèvre dans le Mont-d’Or lyonnais en 1814, et d’autres auteurs sur le mouton dans la Bresse et la Franche-Comté à la même époque. Néanmoins ces faits n’étaient pas considérés comme authentiques, car des essais d’inoculation et des essais de transmission par cohabitation avaient échoué. Des observations précises faites en Bohême en 1859 par Maresch, en Hongrie dans l’année 1861 par Galembéos sur des moutons, en Russie par Jessen en 1864 sur des chèvres, et surtout celles faites en 1866 au Jardin d’acclimatation de Paris, ont tranché définitivement la question. Des gazelles qui avaient été achetées en Angleterre importèrent la peste bovine dans cet établissement ; elles succombèrent à la maladie, qui se communiqua au zébu (Bos indicus), au yack (Bos grunniens), à l’auroch (Bos bosanus), à l’antilope, à la gazelle commune, à la biche, au cerf, au chevrotin, à plusieurs variétés de chèvres et au pécari. En 1864 et en 1866, M. Lemaître, attaché comme vétérinaire à la compagnie du canal de Suez, l’avait observée en Égypte sur des moutons et sur des chèvres, sur des chameaux et sur des buffles. En 1871, elle attaque des moutons en France. Il est donc démontré aujourd’hui que la peste bovine peut sévir sur diverses espèces de ruminans ; mais ce sont les espèces du genre bœuf qui la contractent le plus facilement. Il faut même, pour qu’elle attaque d’autres ani-