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taliers, les templiers, les prieurés de Saint-Lazare, tous les ordres religieux institués pour la garde et la défense des saints lieux, ont des possessions considérables, qui jusqu’ici ont peu profité à la terre-sainte. Il convient de réunir ces religieux en un seul ordre, et de les forcer à vivre en Orient des biens qu’ils y possèdent. Pour leurs biens situés en-deçà de la Méditerranée, ils seront livrés à ferme noble, d’abord de trois ou quatre ans avec croît, et enfin, s’il se peut, en perpétuelle emphytéose. Les templiers et les hospitaliers tireront ainsi de ces biens beaucoup plus de 800,000 livres tournois. Les sommes perçues depuis la prise de Saint-Jean-d’Acre passeront en compte avec tout le reste. On procurera par là des navires, des vivres, tout ce qui est nécessaire aux combattans, si bien que le plus pauvre puisse aller outre-mer. Les vaisseaux nous apporteront des rivages de la terre-sainte les produits de l’Orient, et emporteront en Orient, les denrées de nos climats.

Comme jusqu’à présent la terre-sainte a manqué principalement de population, le pape sommera chaque prélat d’y envoyer à ses frais le plus grand nombre possible de combattans revêtus de robes et d’armes uniformes, avec la bannière du seigneur qui les fait passer. Les hommes mariés formeront une cohorte, les célibataires une autre ; chaque cohorte aura un justicier supérieur. Ceux qui seront de la même nation ne feront qu’une seule armée, s’ils sont en nombre suffisant ; sinon, leurs voisins qui comprennent leur langue se joindront à eux. Toutes les personnes, de quelque condition qu’elles soient, même les femmes, veuves ou épouses, sont invitées à envoyer des soldats ainsi équipés. Chaque troupe sera de cent hommes ; la marche des combattans sera solennelle : ils feront leur entrée dans les villes à son de trompes et bannières déployées pour exciter l’ardeur des populations. Chaque royaume chrétien aura en terre-sainte une ville, un château qui portera le nom de ce royaume ou de la capitale, afin que ceux qui arrivent trouvent en débarquant, après les fatigues et les dangers du voyage, quelque joie et quelque consolation. Les grandes villes d’Acre et de Jérusalem resteront communes : les hommes de chaque pays pourront y habiter ; il en sera de même pour les autres lieux situés près de la mer, et où se rendent les marchands des différentes contrées.

Chaque cité, avec son territoire, aura un capitaine, lequel aura sous lui des centeniers ; chaque centenier commandera huit cohortes. Le passage est la principale difficulté. Il faut qu’une grande partie de l’armée arrive par la terre ferme. On demandera le consentement de Peryalogus (Andronic II Paléologue) et des autres princes sur les terres desquels l’armée devra passer. Par cette voie, qui est la plus longue, pourront aller les Allemands, les Hongrois,