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espèce de colza, un thé sauvage, fournissent de l’huile. Avec les graines de l’arbre à suif[1], on se procure une graisse employée à divers usages. Un vernis excellent pour les meubles est obtenu d’une plante de la famille des euphorbes[2]. Il n’y a que peu de thé dans le pays ; chaque famille cultive simplement quelques arbustes pour les besoins de la maison. Cependant pour le thé, la place de Kin-kiang est l’entrepôt le plus considérable de la province, et dans cette ville on voit de grands ateliers où la précieuse plante reçoit une dernière préparation avant d’être livrée au commerce européen. Des femmes seules sont employées à l’opération, qui consiste à rouler chaque feuille à la main : travail exigeant beaucoup de patience, une extrême agilité des doigts, et néanmoins peu lucratif. L’ouvrière touche 4 sapèques par livre de thé ; les femmes douées d’une habileté exceptionnelle parviennent à gagner en un jour 150 sapèques, représentant 75 centimes de notre monnaie[3].

Les animaux domestiques sont nombreux dans le pays. D’énormes buffles qui cheminent paisiblement animent la campagne ; lorsqu’ils vont en troupe, un homme, monté sur l’un d’eux comme sur un cheval, dirige la marche. Des zébus de la plus grande beauté sont employés au labour ; on fait travailler les taureaux, qui ne se montrent ni moins doux, ni moins dociles que les vaches, car ici, de même qu’à Pékin, les Chinois savent apprivoiser les animaux. On ne connaît pas les ânes, et les chevaux, qui sont très rares dans la province, demeurent réservés au service des mandarins. Tous les transports s’effectuent à dos d’homme ou par les bateaux. Les chiens offrent plus de variété que dans le nord de l’empire, et l’on reconnaît aisément l’influence des races européennes qui ont été introduites à différentes époques. Les oiseaux domestiques sont des poules, des pigeons, des canards et l’oie de Guinée.

Les mammifères sauvages n’abondent pas, comme on pense, dans ce pays déboisé, où la population est immense. L’abbé David a vu cependant des renards, des blaireaux, une belette, des rats, des souris, le porc-épic de l’Inde et des pangolins[4], un type des faunes tropicales. Les pangolins, toujours remarqués par les personnes qui visitent nos musées d’histoire naturelle, ont le corps, les membres et la queue revêtus de grosses écailles tranchantes ; ces animaux étranges, tout à fait privés de dents et pourvus d’une langue extensible et agglutinante, se nourrissant de fourmis ou de

  1. Stillingia sebifera.
  2. Elœococca verrucosa.
  3. Ces renseignemens sont tirés de diverses lettres adressées par le père Armand David à M. Milne Edwards.
  4. Manis Dalmanii.