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dans son discours sur l’emprunt, lorsqu’après avoir indiqué le chiffre de 120 millions il s’est interrompu pour ajouter sous une forme dubitative : « C’est peut-être beaucoup. » Le surplus, c’est-à-dire environ 500 millions, doit être demandé à l’augmentation des impôts anciens ou à la création d’impôts nouveaux.


II.

Les partisans de l’impôt sur le revenu ont saisi cette occasion pour proposer de nouveau leur système. Il est donc vrai que, partout où on l’établit, cette contribution est la ressource des mauvais jours et la fille des grandes crises. L’Angleterre ne s’est résignée à la subir qu’en 1797, pendant la guerre de la révolution française, et en 1842, après l’agitation produite par la ligue des céréales. Encore ne l’a-t-elle supportée qu’avec l’espérance de voir ce mal transitoire diminuer peu à peu et même disparaître définitivement. La France, si nous sommes obligés d’y recourir, l’acceptera aussi comme une conséquence forcée de ses désastres, comme un remède douloureux à des souffrances extrêmes. Comme il est presque sans exemple dans notre histoire financière qu’une contribution dont le produit est important ait disparu, quelque mal assise qu’elle fût, réfléchissons bien avant d’introduire l’impôt sur le revenu, et n’y recourons que s’il nous est impossible, sans ce moyen, de remplir nos engagemens. Il faut d’autant plus y réfléchir que dans notre pays cet impôt se trouve en présence d’objections spéciales qu’il n’a pas rencontrées ailleurs. Nous n’aurons pas en effet de peine à démontrer qu’en France le revenu est atteint de plusieurs manières.

La contribution foncière n’est qu’un impôt sur le produit net moyen des propriétés bâties ou non bâties, et le trésor reçoit de ce côté environ 170 millions. C’est moins qu’il ne recevait en 1791, car le principal fut, à l’origine, fixé à 240 millions. La réduction s’explique par la création postérieure de taxes de consommation et de droits de mutation dont l’incidence réfléchissait sur les propriétaires du sol. Malgré cette diminution, la contribution foncière est dans certaines communes égale au cinquième du revenu, et toute addition serait extrêmement onéreuse. Un impôt de 5 pour 100 sur le revenu porterait la charge à 25 pour 100 ou au quart. Il est vrai que, dans beaucoup d’autres communes, l’impôt foncier est plus léger, et descend jusqu’au dix-septième du revenu. Est-ce une raison pour écraser par une augmentation les contrées qui sont surtaxées? — La contribution personnelle-mobilière est-elle autre chose qu’un income-tax sur la valeur locative de l’habitation? C’est même un impôt général sur les revenus de toute espèce, et on lui a, bien à tort, donné la qualification de mobilier, car