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surtaxe parût trop lourde aux contribuables. Quel souscripteur d’un effet de 100, 200 ou 300 francs s’apercevra qu’on lui demande 10 ou 15 ou 20 centimes au lieu de 5 ou 10 centimes? Jamais taxe ne satisferait mieux à l’anesthésie de l’impôt, et cependant cette mesure procurerait, sans faire crier les imposés, une vingtaine de millions au trésor.

Quant au timbre sur les journaux et écrits périodiques, le projet propose de remettre en vigueur la loi de 1850. On reprendrait donc la distinction entre les journaux avec feuilleton et les journaux sans feuilleton. Les premiers seraient soumis à une surtaxe de 1 centime par feuille (6 centimes par feuille pour les premiers et 5 centimes par feuille pour les seconds). Ces droits sont assurément élevés, si on les compare au régime de complète exemption sous lequel vit aujourd’hui la presse, mais modérés par rapport aux droits qui la grevaient avant le décret abolitif du timbre. La question du reste sera reprise lorsque le rétablissement du calme permettra de discuter une loi organique de la presse. Aujourd’hui le retour, à titre de mesure provisoire, à une loi qu’avait adoptée une assemblée libérale sous la constitution de 1848, nous paraît être la mesure la mieux appropriée aux circonstances, puisque le temps manquait pour réviser la législation. Nous devons cependant faire remarquer que la taxe de 1850 est aggravée parce qu’elle s’ajoute à l’impôt sur le papier. L’exposé des motifs évalue à environ 8 millions le produit du timbre sur les journaux. C’est presque un dixième de ce que doivent donner les surtaxes de timbre et d’enregistrement dont le gouvernement attend une somme d’environ 90 millions. Sur ce total, il faut s’attendre à quelques mécomptes, car les produits de plusieurs articles sont d’une évaluation difficile. L’élément dont le résultat est le plus sûr, c’est assurément le deuxième décime additionnel que le projet propose d’ajouter à tous les droits sans exception perçus par l’administration du timbre et de l’enregistrement; le rendement en est évalué à environ 31 millions. La qualité de taxe additionnelle permet d’en apprécier le produit avec certitude, parce que les calculs sont établis sur un principal connu.

Le projet demande aussi beaucoup aux contributions indirectes, et spécialement aux taxes sur les boissons. Les droits de détail et d’entrée sont trop élevés pour qu’on pût songer à les augmenter; mais la vente en gros ne donne pas tout ce qu’elle pourrait produire, c’est pour l’atteindre que le projet double les droits de circulation. « Il paraît possible de les doubler, dit l’exposé des motifs, ce qui laissera encore le nouveau droit au-dessous du tarif imposé en 1817. L’équité commande d’ailleurs de réduire l’écart qui existe, au profit des classes aisées, entre le droit de circulation et le droit de détail. » Certes l’écart reste énorme malgré cette augmentation, puis-