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ration une garantie contre les dangers de l’avenir, une manière facile d’entraîner toutes les nations du monde dans une politique maritime dont la race anglo-saxonne aura posé les bases.

En face de telles considérations, les reproches de détail que l’on a pu adresser au traité de Washington ne soutiennent pas longtemps l’examen; nous ne nous étendrons pas longuement sur la portion des protocoles de la commission qui a trait aux indemnités réclamées par l’Angleterre pour les incursions des fenians au Canada, aux pêcheries et à la navigation des fleuves canadiens. Les commissaires américains refusèrent absolument de discuter la question des indemnités réclamées pour les incursions des fenians au Canada. Le gouvernement américain ne se considérait pas comme responsable de l’entrée de bandes très peu nombreuses dans le Canada. Ces aventuriers n’avaient jamais pu rester que quelques heures au-delà de la frontière, ils n’avaient jamais pu la dépasser que de quelques pas, et les dommages qu’ils avaient causés étaient, au dire de lord Kimberley lui-même, absolument insignifians.

La question des pêcheries est beaucoup plus grave. On admit le principe de la réciprocité. Les pêcheurs américains pourront désormais aller librement dans les eaux de la province de Québec, de la Nouvelle-Ecosse, du Nouveau-Brunswick, de la colonie du Prince-Edouard et des îles voisines à toute distance des côtes; ils pourront débarquer sur toutes les côtes, toutes les îles, pour sécher leurs filets et saler le poisson. Réciproquement les sujets anglais pourront pêcher dans les eaux des États-Unis jusqu’au 33e degré de latitude nord. Comme les pêcheries canadiennes et américaines ne sont pas également riches, des arbitres spéciaux doivent se réunir à Halifax pour fixer la somme qui sera payée par les États-Unis à l’Angleterre à titre de compensation.

Le Canada, Il faut le confesser, a fait mine au début de vouloir résister aux stipulations qui le concernent dans le traité de Washington; mais l’irritation des colonies anglaises du nord de l’Amérique est déjà calmée. Ainsi que le faisait remarquer à la chambre des communes sir Charles Adderley, l’un des hommes politiques qui sont le plus familiers avec les questions coloniales, les Canadiens trouveront toujours de grands avantages à pêcher dans leurs propres eaux; ils sont assurés d’un marché rapproché, et ils n’ont pas grand’chose à redouter des pêcheurs américains. Cependant à la suite de longues controverses les chambres canadiennes avaient fini par considérer la question des pêcheries et celle du traité de réciprocité comme absolument connexes; elles sont mécontentes que les commissaires anglais ne les aient pas résolues du même coup. Quoi qu’il en soit, il s’établira tôt ou tard entre les États-Unis et