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lutionnaire, faisait mettre les murailles en état, achetait des armes et ramassait des munitions. On somma les bourgmestres de rentrer dans la ville, et comme ils ne tinrent aucun compte de cette injonction, on contraignit le sénat de préposer à leur place un syndic. Les sénateurs comme toujours courbèrent la tête devant l’orage, ne dissimulant pourtant pas leur irritation et leurs inquiétudes. De tels préparatifs étaient un défi jeté au prince-évêque, qui réitérait plus que jamais ses sommations, menaçant, s’il n’y était pas fait droit, de traiter Münster en ville rebelle.

Le sénat, dans ses réponses au prélat, avouait que l’autorité lui échappait. Alors Franz de Waldeck résolut d’agir vigoureusement. Le péril était d’ailleurs pour l’église plus imminent que jamais. Les luthériens avaient pris une attitude audacieuse dans plusieurs villes de ses états, et quelques-unes étaient complètement entre leurs mains. Paderborn s’était déclaré pour la réforme, et l’archevêque de Cologne, qui en occupait le siège épiscopal, songeait à soumettre cette ville par les armes. Une diète provinciale fut convoquée à Bilrebecke le 17 septembre 1532. Franz y représenta le danger que faisait courir à la religion la révolte des habitans de Münster, dont l’exemple pouvait devenir contagieux dans toute la province. Il fit appel chez sa noblesse à l’intérêt qu’elle avait de maintenir l’ordre et de soutenir l’autorité légitime. Son discours convainquit les membres de la diète. Les seigneurs, les chevaliers assurèrent l’évêque de leur concours; mais ils demandèrent qu’on épuisât préalablement les moyens de conciliation. Franz de Waldeck y consentit, et une députation de la noblesse westphalienne ouvrit des pourparlers à Wolbeck avec les délégués de Münster. Voici quelles étaient les conditions auxquelles devaient souscrire les habitans : suppression de toutes les innovations introduites dans le culte, éloignement des prédicans, soumission à l’autorité épiscopale. Les négociations se continuèrent plusieurs jours sans aboutir. Il devenait manifeste que le sénat, ou plutôt le parti qui le dominait, ne cherchait qu’à gagner du temps. L’évêque brisa là; il comprit qu’il fallait agir par la force. Comme une tentative d’assaut pouvait coûter la vie à bien du monde, il fut résolu qu’on se bornerait à un blocus. Les troupes épiscopales interceptèrent les routes qui aboutissaient à la ville, de façon à l’empêcher de recevoir des vivres et d’entretenir avec le dehors ses relations habituelles de commerce. La disette ne tarda pas à se faire sentir dans Münster, et les bourgeois parlaient d’accéder aux conditions de l’évêque; mais la classe inférieure ne voulait point entendre parler de se rendre. Les gildes, excitées par les prédicans, menaçai mt les lâches qui prononçaient le mot de capitulation, et, comme leurs chefs gouvernaient de fait la ville, tout