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vint pas à s’entendre. Une seconde fut arrêtée pour le lendemain; on y appela tous les erbmänner et les bourgeois catholiques. Les conservateurs se trouvaient ainsi en majorité, et des mesures répressives furent votées d’acclamation. Les bourgeois étaient si résolus qu’un grand nombre, pour braver la populace, vinrent se faire inscrire nominativement comme étant tout prêts à donner leur concours armé au rétablissement de l’ordre. Les luthériens se voyaient dans la nécessité de tendre la main aux catholiques pour résister au flot montant de la démagogie. Eux qui avaient naguère poussé les gildes contre ceux qui tenaient pour l’ancien culte imploraient maintenant contre ces corporations l’appui de leurs adversaires de la veille. L’exil des prédicans fut décidé. Le sénat écrivit à l’évêque pour solliciter de lui une escorte destinée à accompagner les bannis. Le peuple fut indigné d’une pareille démarche, et il accusa le corps municipal de trahir la cause évangélique. Les catholiques relevaient la tête et parlaient de ressaisir l’autorité. Ils reprochaient publiquement aux luthériens d’avoir été la cause originelle de tout le mal, et quelques notables de ce parti se virent en butte à leurs injures. Cette conduite maladroite fit perdre aux catholiques tout le terrain qu’ils avaient gagné.

Assurément, les évangéliques craignaient le triomphe des radicaux, mais ils redoutaient plus encore le retour d’un régime qu’ils avaient contribué à renverser. Van der Wieck, préoccupé du danger qu’avait pour la réforme à Münster une alliance avec la réaction, mit tout en œuvre pour dissiper les attroupemens, sans faire intervenir l’évêque et le chapitre. La collision était pourtant bien près d’éclater. Rothmann et ses partisans s’étaient réunis en armes, avec du canon, à l’église Saint-Lambert, tandis que les autorités et les luthériens occupaient l’hôtel de ville. Les catholiques attendaient dans leurs demeures avec anxiété l’issue d’une lutte qui paraissait inévitable; mais l’activité du syndic parvint à tout arranger. A force d’insistance, il obtint de la commune de souscrire aux conditions suivantes : Roll, KIopriss, Staprade et tous les pasteurs wassenbergeois quitteraient la ville avec un sauf-conduit de l’évêque; ils seraient indemnisés de la dépense qu’entraînait pour eux cette expulsion. On leur accorderait même un sursis pour qu’ils pussent mettre ordre à leurs affaires; Rothmann aurait la liberté de rester, mais interdiction lui serait faite de prêcher. Les artisans reprirent leurs travaux, les bourgeois retournèrent chez eux, et le calme sembla rétabli. Les luthériens se croyaient enfin débarrassés d’adversaires qui avaient bouleversé leur église. Ils travaillaient avec ardeur à en raffermir la constitution. On écrivit au landgrave de Hesse pour lui demander de nouveaux pasteurs dont la prédication devait