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irait probablement jusqu’à se traduire par des actes de violence, dont le résultat serait de rapprocher de plus en plus les conservateurs et de réunir dans une action commune ceux qui sont responsables, c’est-à-dire les représentans de la nation. »

En écrivant ces dernières lignes, qui ont excité à un si haut point l’indignation de M. Ernest Duvergier de Hauranne, je ne pensais pas que les événemens viendraient si tôt les justifier, et cependant voilà que le seul fait d’avoir engagé la majorité de l’assemblée nationale à user de ses droits, à agir, suffit à soulever ces colères, ces rancunes, qu’un acte seul semblait devoir susciter.

Comment expliquer autrement les imputations, tout au moins étranges, dirigées contre mes paroles par M. Ernest Duvergier de Hauranne ? À quel endroit de notre écrit est-il parlé de l’avènement de la droite au pouvoir? Où est-il dit que cet avènement soulèverait des troubles ? Où avons-nous annoncé que ces troubles, nous les souhaitions, parce que de l’excès du mal pourrait sortir le bien?

Nous n’avons imprimé nulle part une seule de ces idées, par la bonne raison que nous ne les avons jamais partagées.

Nous avons souhaité de toutes nos forces l’avènement du régime parlementaire, que nous avions cru jusqu’ici devoir être particulièrement cher à M. Duvergier de Hauranne. — Ce régime amènerait l’avènement au pouvoir, non pas de la droite, mais de la majorité conservatrice, de celle à laquelle je me fais honneur d’appartenir; elle se compose de toutes les fractions libérales de l’assemblée nationale, depuis la droite modérée jusqu’à cette portion du centre gauche que M. Duvergier de Hauranne côtoie sans cesse sans y entrer.

Cette majorité-là est formée d’hommes qui peuvent avoir une préférence pour la forme monarchique, et qui n’éprouvent pas le besoin de rougir lorsqu’on les qualifie de monarchistes; mais avant tout elle est française. — Comme telle, en ce moment, elle a mis de côté ses préférences; elle accepte loyalement la république de M. Thiers, pour ne poursuivre qu’un but, la ligue des hommes d’ordre contre les hommes de désordre, et pour empêcher ainsi l’avènement au pouvoir de ceux qui en auraient bientôt fini de la société, si la Francs leur était livrée.

Cette ligue excite les colères du parti radical; elle amènera peut-être des actes violens. Eh bien! ce sont ces actes, s’ils venaient à se produire, devant lesquels, avons-nous dit, le grand parti de l’ordre ne devrait pas s’arrêter, et nous avons pu constater il y a peu de jours, à la façon énergique dont les troubles du département du Nord ont été réprimés, que nous n’étions pas les seuls à penser de la sorte.

Quant à prétendre que nous appelons de nos vœux les perturbations publiques, parce que de l’excès du mal devrait sortir le bien, ce sont là des affirmations que nous dédaignons de relever, car elles ne nous at-