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bec, que le stercoraire des régions australes. Le fou pêcheur, l’albatros au bec vert, le pétrel de l’Atlantique, la frégate mignonne, font aussi des apparitions sur la grande île, principalement sur les côtes méridionales. Aux mêmes lieux, on voit les oiseaux dont la queue présente deux pennes minces semblables à des fils, les paille-en-queue, comme les appellent les marins, les phaëtons des naturalistes. Une espèce à filets rouges parcourt la zone torride tout entière ; une autre à filets blancs et à bec jaune semble ne pas s’éloigner de la Grande-Terre, et surtout des îles Mascareignes.

Notre petit grèbe d’Europe se baigne jusque dans les eaux du lac de Tananarive, et rencontre une espèce de son genre qui est particulière au pays. On le sait, les canards ne redoutent pas les grands voyages ; ceux qui habitent le continent africain viennent volontiers s’établir dans la grande île. Sur les rivières et les lacs, c’est un charmant spectacle, par un beau jour, de voir s’ébattre une foule de ces oiseaux au plumage brillant et varié. Une grosse espèce d’un noir verdâtre à reflets métalliques bronzés et violets, ayant la tête et le cou blancs marqués de taches d’un noir violacé, fait les délices des habitans ; — elle est commune à Sainte-Marie, aux environs de Tamatave, de Foulepointe, d’Andouvourante ; de plus petites espèces encore mieux parées ne sont pas beaucoup moins répandues. Parmi ces palmipèdes, dont les premiers parens vivaient sans doute dans d’autres parages, on distingue une jolie sarcelle qui n’a pas été observée ailleurs que sur la Grande-Terre[1] ; elle offre un délicieux mélange de teintes brunes, fauves, ferrugineuses et ardoisées, sur une portion blanche des plumes des ailes une sorte de miroir bronzé tout chatoyant, il ne faut pas encore quitter les bords des lacs et des rivières, car le contemplateur de la nature aperçoit encore divers oiseaux bien connus sous d’autres climats et plusieurs espèces vraiment indigènes. Notre vulgaire poule d’eau d’Europe, la marouette de nos étangs, estimée des chasseurs et des gourmets, se montrent, ainsi que la grande foulque à crête d’Afrique. Dans les marais court une superbe poule sultane. Son magnifique plumage bleu, sa plaque rouge sur la tête, ses pieds de la couleur du corail, garnis d’une touffe blanche, la font reconnaître de loin au milieu des herbes : c’est la poule sultane de Madagascar, qui habite également Maurice et l’Afrique ; mais on découvre des ralles, — ceux-ci sont des espèces particulières à la grande île, — puis des jacanas, oiseaux du type des ralles et des poules d’eau, montés sur des échasses, ayant de longs doigts grêles, les ailes armées d’un éperon. Ils courent sur les herbes avec une étonnante prestesse, et

  1. Querquedula gibberifrons (Q. Bernieri, Verreaux).