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huguenots de prendre le dessus, et l’on prétend que ces secours ont pour but le bien de la religion, etc. »

De son côté, la détresse d’Henri III n’était pas moins extrême; tous les partis étaient exténués. Le duc de Guise préparait avec activité des armemens pour continuer la guerre et arriver enfin à la solution décisive. Il pressait le duc de Parme d’envoyer des lansquenets à son aide, et ce dernier faisait lever 8,000 Suisses pour cette destination. Mendoza dépêchait le 30 mai à Philippe II que Mucius était résolu à faire marcher sa cavalerie sur Chartres, afin de réduire le roi; « et si, malgré les secours du duc de Parme, ce but vient à être manqué, on espère du moins forcer les troupes royales à abandonner leur position et à passer la Loire, ce qui serait un point essentiel, puisqu’il faut que Chartres soit délivré pour pouvoir conserver les relations avec Orléans, Rouen et les autres villes... Je supplie votre majesté de me faire connaître la ligne de conduite qu’elle m’ordonne de suivre, dans le cas où, forcé de passer la Loire, le roi inviterait les ambassadeurs à le suivre dans sa retraite. » Le malheureux Valois était poussé dans ses derniers retranchemens, il n’avait plus ni capitale, ni armée, ni ombre d’autorité réelle; dans son parti même, chacun se gouvernait à sa guise : il se résigna aux négociations et fit appel à l’habileté de sa mère et à l’expérience de M. de Villeroy, qui demandèrent à conférer avec le duc; mais cette fois les ligueurs, conseillés par Mendoza, ne permirent pas au chef du parti de voir, comme aux 12 et 13 mai, la reine-mère ni M. de Villeroy en particulier.

Mendoza rend compte à Philippe II de cet incident. « Le duc de Guise a répondu, dit-il, que les affaires qui étaient traitées en ce moment n’étaient point ses affaires particulières, mais celles de tout le parti de la ligue, et que par conséquent il n’écouterait rien qui ne fût de nature à être entendu de tout le monde. La reine-mère elle-même n’a pu lui parler en particulier, et inutilement a-t-elle mis tous ses artifices en usage pour obtenir un entretien secret avec lui. Il s’est montré inébranlable, à la grande joie des catholiques et des villes unies. » Les conditions étaient les mêmes que celles du 13 mai, avec quelques clauses aggravantes et une méfiance plus marquée. Des deux côtés, il y avait absence de bonne foi, et la fin de cette affaire devait être misérable pour tout le monde. Les Guises voulaient réduire Henri III au dernier degré d’abaissement et de déconsidération politique, et ne comptaient pas même sur l’exécution du traité proposé. Le roi souscrivait comme contraint et forcé, obtenait du temps, et se promettait bien de prendre vengeance de tant d’injures à la première occasion. Philippe II lui-même cherchait à tromper le duc de Guise. « A la ma-