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pas l’objet de quelque réclamation nouvelle envers la France. L’empire des Zollern sera redevenu le saint-empire des Souabes et des Otton, moins le couronnement par le pape. Que dis-je ? l’empereur zollérien étant pape aussi bien qu’empereur, son empire est celui d’Otton le Grand perfectionné. Voulez-vous voir sa carte géographique ? Elle est au premier volume de l’Histoire de l’empire allemand de M. Giesebrecht.

Quant à la condition intérieure de l’empire lui-même, qui pourrait douter qu’elle ne subisse aussi de profondes modifications ? La constitution germanique n’est plus de la compétence d’une diète souveraine, comme elle l’a été pendant neuf cents ans. Elle est, d’après le décret organique de 1871, à la discrétion de l’empereur, investi à ce sujet du pouvoir constituant. Par conséquent ses changemens ultérieurs ne sont soumis à aucune entrave, relativement au chef de l’empire. Le peu d’individualité politique survivant à l’absorption prussienne disparaîtra donc graduellement par la force des choses, et la démocratie allemande, qui s’est attachée à la chimère de l’unité, mais qui nourrit une autre passion inhérente au sentiment démocratique, à savoir la haine du petit prince, la démocratie ne manquera pas d’applaudir à cette médiatisation de nouveau genre absorbant les petits souverains existant encore en Allemagne. La suzeraineté ne suffira, point aux Zollern, il leur faudra la souveraineté directe sur la terre et les personnes. La patrie allemande en sera bien plus forte et plus puissante ! Adieu les petits rois vassaux, les grands-ducs et princes souverains ! Ainsi fit jadis Charlemagne, ainsi fera quelque Zollern. Il sentait bien sa nationalité menacée, ce courageux député bavarois qui, dans la séance du 5 janvier 1871, refusait à la chambre des représentans de Munich le subside qui lui était demandé pour continuer la guerre contre la France. Il s’applaudissait d’avoir été l’un des quarante-sept qui, le 19 juillet précédent, s’étaient prononcés contre la participation de la Bavière aux hostilités et avaient voté pour le maintien d’une neutralité armée. Un autre député, reprenant la question au point de vue de l’unité, ne craignit pas de dire que, pour une telle guerre, il n’accorderait pas un kreutzer. Enfin un troisième, après une vive réplique des ministres, ajoutait que c’était précisément parce que l’armée allemande était victorieuse qu’on pourrait conclure une paix honorable, si c’était le bon plaisir des gouvernans de l’état-major. Il voulait que le roi de Prusse pût se convaincre que tout n’était pas en Allemagne fêtes et réjouissances en l’honneur de la guerre, qu’au contraire il y coulait bien des larmes, et qu’il y existait bien des misères. Il s’est aussi demandé si toute paix, pour être honorable, devait aboutir à des conquêtes. Il croyait que non, et, suivant