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conviction qu’il est de mon devoir envers moi-même comme envers mes collègues de vous délivrer, vous et d’autres, de la nécessité de décider entre mes vues et celles de certains membres du cabinet sur ces matières, en plaçant, comme je le fais en ce moment, ma démission entre vos mains.

« Je me suis en effet trouvé pendant quelque temps dans une situation difficile par rapport à cette question.

« La note collective du mois de juillet dernier, — la décision du cabinet tenu à Windsor au mois d’octobre, — la suite et la teneur de mes communications écrites avec les gouvernemens étrangers, dont les membres du cabinet ont eu connaissance, — nos communications verbales avec les envoyés et les ministres de ces gouvernemens dans ce pays et avec Brunnow en particulier, — les deux projets de convention que, si je ne me trompe, j’ai lus il y a quelque temps au cabinet, celui qui a été rédigé par moi-même, l’autre par Brunnow et Neumann, étaient tous conçus au même point de vue : l’avantage de maintenir l’indépendance et l’intégrité de l’empire ottoman ; et je me suis considéré, en suivant cette voie, comme agissant avec la connaissance et la sanction du cabinet. D’autre part, quelques membres du cabinet, dans leurs conversations avec ces mêmes ministres étrangers avec lesquels j’étais ainsi en négociation, ont tenu des propos et formulé des opinions qui dénotaient une différente manière d’envisager la question, et j’ai appris de divers côtés que des personnes n’appartenant pas au gouvernement, mais connues pour entretenir des relations intimes avec des membres du conseil, avaient eu soin, tant en Angleterre qu’à l’étranger, de faire croire que ma manière de voir n’était pas celle de la majorité de mes collègues, que par conséquent, dans la circonstance, je ne devais pas être considéré comme l’organe des sentimens du gouvernement britannique.

« Le but particulier et immédiat que je me suis efforcé depuis quelques mois d’atteindre, d’accord avec les représentans de l’Autriche, de la Russie et de la Prusse, a été de persuader au gouvernement français d’entrer dans quelque plan d’arrangement entre le sultan et Méhémet-Ali, que les quatre autres puissances pussent considérer comme compatible avec l’intégrité de l’empire ottoman et l’indépendance politique de la Porte. En cela, j’ai définitivement échoué. Peut-être le but était-il dans tous les cas impossible à atteindre, au point où en était l’affaire ; mais les circonstances dont je viens de parler n’étaient pas faites pour diminuer mes difficultés.

« La question qui se présente maintenant pour le gouvernement anglais est de décider si les quatre puissances, n’ayant pas réussi à persuader à la France de se joindre à elles, veulent ou ne veulent pas poursuivre l’accomplissement de leurs projets, non-seulement sans le secours de la France, mais avec la certitude, d’après les déclarations