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continueront à recevoir une indemnité pour l’entretien de leurs routes alpestres internationales.

Les postes et les télégraphes fourniraient une autre source de revenus nouveaux. Lors de la centralisation du service des postes, il fut alloué à chacun des cantons dépossédés une somme égale au produit moyen des années 1844, 1845 et 1846, pourvu toutefois que le produit total pût y suffire. C’est cette indemnité qu’il s’agit maintenant de supprimer pour l’attribuer aux dépenses de la confédération. La taxe des exemptions militaires, payée jusque-là aux cantons, passe aussi dans les mains de la confédération. On voit par là quel pas immense la Suisse se prépare à faire dans la voie de la centralisation financière. La constitution de 1848 autorisait seulement la législation fédérale à supprimer les péages locaux, cantonaux ou municipaux, et à se les approprier moyennant indemnité. Aujourd’hui la centralisation des services entraîne aussi la concentration des revenus ; on est même forcé d’ajouter aux ressources énumérées plus haut un nouvel impôt sur le tabac, que le projet de révision accorde à la confédération la faculté de créer suivant ses besoins.

À ces mesures financières indispensables, les auteurs de la révision ont joint un certain nombre de réformes pratiques aboutissant toutes à une extension plus grande des pouvoirs du gouvernement fédéral. Dans ce nombre, il faut compter la disposition qui confère à l’autorité fédérale la police des endiguemens et des forêts, la surveillance et la direction des travaux de reboisement. Il faut en dire autant de l’unité des poids et mesures, du droit de législation fédérale sur la pêche et la chasse, de la suppression des maisons de jeu, du droit de législation accordé au gouvernement fédéral sur les industries insalubres et dangereuses, sur le travail des enfans dans les manufactures, sur la surveillance des agences d’émigration et des entreprises d’assurances. Ce sont toutes mesures incontestablement utiles, mais dont le résultat naturel est de grossir les attributions du pouvoir central au détriment des cantons. Il en est de même des nouvelles dispositions qui assurent la liberté du commerce et de l’industrie. Jadis, avant la révolution de 1848, l’exercice de toutes les professions libérales, commerciales et industrielles était soumis par les lois locales à de nombreuses et insupportables entraves. Aujourd’hui même la liberté de l’industrie, telle qu’elle est garantie par la constitution, ne s’applique qu’aux Suisses établis dans des cantons étrangers, mais non pas encore aux Suisses résidans. Il règne encore dans certains cantons des inégalités flagrantes entre les nouveau-venus et les anciens habitans du canton. On cite même certaines villes où s’appliquent