Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 105.djvu/137

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme d’abus était aboli ; mais l’état déclarait que dans aucun cas il ne prêterait à l’église le bras séculier.

La chambre n’accepta pas ce système sans modification. Au fond, il n’était pas complet, car on ne décidait pas quels seraient les droits de l’état par rapport à la propriété ecclésiastique. D’ailleurs, si l’on ne voyait pas sans méfiance cet abandon de toute intervention du pouvoir laïque, on ne savait d’un autre côté comment combiner cette intervention avec la liberté qu’on voulait donner à l’église. Les difficultés étaient senties autant que le comte de Cavour lui-même paraissait les avoir senties dans ses instructions de 1860, un peu mieux peut-être ; mais on ne voyait pas davantage comment en sortir. Dans de telles conditions, une assemblée s’arrête à un compromis et préfère surseoir à toute décision. C’est le parti que l’assemblée italienne finît par prendre.

Les gouvernemens italiens, ainsi que la plupart des autres gouvernemens catholiques, exerçaient deux sortes de droits touchant l’installation des évêques et des curés. L’un dépendait des concordats, c’était le droit de présentation ; on consentit à l’abandonner, et c’était juste, puisque les concordats avaient cessé de faire loi pour tout le reste. L’autre droit dépendait de ce principe, qu’aucune sorte de juridiction ne peut être exercée dans l’état que par lui ou de son aveu ; c’était le droit de viser le décret de nomination de l’évêque par le pape ou du curé par l’évêque, l’exequatur et le placet. Ce droit, qui ne dépendait pas des concordats, on le garda, tout en ajoutant qu’on y renoncerait le jour où une loi réglerait le sort de la propriété ecclésiastique.

Cette loi n’a pu encore être présentée. Elle n’est pas urgente dans l’état des esprits. D’ailleurs le point capital d’une pareille loi serait en Italie, comme partout, le bénéfice, — cette propriété à la jouissance de laquelle est inhérent l’exercice d’un pouvoir, — ce reste juridique du moyen âge. Doit-il être conservé comme en Allemagne, ou aboli comme en France ou en Belgique ? Et si on l’abolit, les droits exercés par les gouvernemens dans la nomination des bénéficiera et dans l’administration du temporel pendant les vacances et à chaque nouvelle collation doivent-ils être abandonnés tout à fait ou exercés par la représentation du diocèse ou de la paroisse ? Évidemment c’est le second système qu’il faudrait choisir, mais l’application n’en peut être faite sans les deux conditions suivantes, ou au moins sans l’une des deux : d’abord que l’autorité catholique s’y prête, ensuite que -les citoyens catholiques veuillent en majorité y prendre part. Tant que l’autorité catholique résistera et que les catholiques qui voudraient faire cesser cette résistance resteront une petite minorité, la loi ne parviendrait qu’à créer un schisme impuissant. En Italie, les catholiques n’ont pas l’esprit guerrier ; quant