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de ces édifices sont hors de proportion avec le nombre de leurs habitans. On a pu s’en rendre compte quand le gouvernement a eu besoin d’en exproprier quelques-uns pour y caser ses administrations : il a été toujours possible de loger à l’aise les religieux et les religieuses dans un coin du vaste couvent, qui était d’ordinaire une vaste solitude, et pourtant on y a laissé à chaque religieux ou religieuse un espace plus que suffisant pour une habitation convenable et commode.

Le ministère avait donc des raisons majeures pour étendre à la ville et à la province de Rome les lois sur la propriété ecclésiastique. C’était pour lui une question d’opportunité. Il a pensé que le moment était venu, et a déposé son projet de loi le 20 novembre dernier. Si la discussion n’a pas encore été ouverte, c’est que tout est long dans les chambres italiennes par le fait des règlemens parlementaires aussi bien que des lenteurs individuelles. Voici le principe d’où est parti le cabinet dans son projet : appliquer, comme je viens de le dire, à Rome la loi commune, c’est-à-dire les deux lois de 1866 et de 1867 ; il s’était engagé à le faire, et ni l’occasion n’aurait été bonne, ni les idées assez mûres pour en changer l’économie générale. Seulement ces lois ont deux côtés, l’un simplement économique, l’autre plus proprement ecclésiastique ; elles ne se bornent pas à changer la forme de la propriété possédée par les personnes juridiques ecclésiastiques reconnues jusqu’ici, elles en suppriment plusieurs. Le cabinet était parfaitement décidé à ne renoncer en rien au but économique des deux lois ; mais les dispositions relatives à la suppression de fondations ecclésiastiques soulevaient à Rome des difficultés toutes particulières.

Ainsi le projet admet que la propriété immobilière ecclésiastique de toute sorte, excepté celle des paroisses, soit, à Rome comme partout ailleurs, entièrement convertie en propriété mobilière ; mais quant aux fondations ecclésiastiques qui les possèdent et qui auraient été atteintes par les deux lois, il faut distinguer. Parmi ces fondations, il y en a qui intéressent la catholicité en général, d’autres qui concernent l’organisation traditionnelle de la curie romaine, quelques-unes enfin qui ont un intérêt pour les états étrangers. Voici comment le projet tient compte de cette situation exceptionnelle.

On sait d’abord qu’à Rome vivent les chefs des ordres religieux répandus sur toute la surface du globe. Comme on ne peut changer leur mode d’existence sans troubler leurs relations au dehors, le projet maintient les couvens où résident les chefs d’ordre, en essayant, par une fiction juridique un peu subtile, de mettre d’accord cette disposition avec le principe de la loi de 1866 qui supprime les corporations religieuses. Il fallait ensuite. avoir égard aux