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Interprétés par les graveurs, depuis Edelinck jusqu’a Desnoyers, et que depuis les écrits de Quatremère et de M. Vitet jusqu’à l’ouvrage, récemment publié par M. Gruyer, les meilleurs travaux biographiques ou critiques sur Raphaël ont été entrepris et produits. Enfin c’est à la France que revient l’honneur d’avoir de tout temps le plus avidement recherché et le plus habituellement conquis les chefs-d’œuvre de Raphaël. Du vivant même de celui-ci, et avant que personne en dehors de l’Italie se fût. avisé d’une semblable tentative, François Ier sollicitait et obtenait pour notre pays le Saint-Michel et la grande Sainte Famille, qui porte aujourd’hui son nom. Un peu plus tard, au fur et à mesure des occasions, il s’emparait, sans regarder au prix, de la Belle Jardinière, du petit Saint George, de Sainte Marguerite, du portrait de Jeanne d’Aragon. Dans le siècle suivant, quatre autres tableaux, — parmi lesquels le portrait de Balthasar Castiglione, et ce merveilleux portrait de Jeune homme, qu’on a voulu à tort faire passer pour celui du peintre lui-même, — venaient s’ajouter aux tableaux acquis par François Ier, et, sous le règne de Louis XV, le Sommeil de Jésus complétait cette admirable série, gloire principale de notre musée. De nos jours encore, plusieurs dessins du maître ont accru la belle collection que les acquisitions faites à partir du règne de Louis XIV avaient successivement enrichie. On le voit, le culte de Raphaël est une tradition bien française, et le devoir d’augmenter, le cas échéant, par quelque ouvrage signé de ce grand nom, le nombre de ceux qui nous appartenaient déjà un devoir presque national. On n’y a pas failli, il y a fort peu de jours. Ces peintures de la Magliana détachées du mur qu’elles décoraient dans l’ancienne villa de Jules II et de Léon X, ces fresques transportées à Paris par l’amateur qui les avait achetées à Rome en 1869, sont devenues la propriété de la France, grâce à l’intervention personnelle, dit-on, de M. le président de la république. Il faut s’applaudir d’un résultat qui assure à notre pays la possession d’un nouveau monument de l’art de Raphaël, monument d’autant plus précieux qu’il n’aura, en raison de sa nature même, de sa qualité de fresque, un équivalent dans aucun autre musée de l’Europe. Mais revenons au musée des copies.

Une salle entière est consacrée aux fresques du Vatican ; d’autres copies d’après des tableaux de Raphaël disséminés dans les diverses galeries de l’Italie, de l’Espagne et de l’Angleterre, plusieurs portraits, quelques-unes des peintures décoratives de la Farnésine ornent les murs d’un salon voisin. Si toutes ces reproductions ne sont pas irréprochables, si parfois même telle d’entre elles ne fournit du modèle qu’une image laborieusement insuffisante, l’ensemble, — sans parler des inévitables beautés inhérentes à l’invention de chaque scène, — est de nature à donner une idée. assez juste des chefs-d’œuvre qu’il s’agissait de faire revivre. Plus d’un, il est vrai, n’a pas laissé de changer quelque peu d’aspect en subissant l’épreuve d’une traduction par des