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la prie d’informer M. de Neville de sa décision. Le comte sort, Jeanne rappelle son amant. A peine celui-ci a-t-il entrevu la perspective qui s’ouvre devant lui qu’il est dégrisé. Perdre sa carrière et se charger d’une femme mariée ! Il conseille à sa cousine de se retirer chez « son excellente mère ; » il ébauche des excuses, et finit par s’esquiver. La pauvre femme, mortellement humiliée, voit revenir son mari avec terreur. Elle entend avec une résignation profonde le sermon qu’il lui fait. « Vous ne m’avez pas aimée ! » est tout ce qu’elle trouve à lui répondre. Il plaide encore sa cause, gagnée d’avance. « Rien n’est donc possible ? » demande-t-elle timidement lorsque le comte lui dit adieu. — « Le pardon dépend de moi, répond M. de Solis ; quant à l’oubli, c’est l’affaire du temps ! » — C’est sur cette vague promesse de retour que tombe le rideau, et l’on sent que la leçon profitera à la pauvre désabusée, qui sait désormais quel fonds il convient de faire sur les sermens d’un amoureux de salon. — M. Octave Feuillet a réussi à enfermer dans le cadre gracieux d’un proverbe tout un drame domestique, et la moralité de la pièce, ainsi dégagée de toute péripétie accessoire, n’en est que plus frappante et plus persuasive. Dire que le dialogue fin et animé, l’intrigue aisément nouée et rapidement menée, tiennent le spectateur sous le charme jusqu’au bout, ce n’est rien apprendre de nouveau à ceux qui connaissent ce talent si sûr de lui-même ; mais n’est-il point permis de regretter que M. Octave Feuillet nous mesure ses largesses avec tant de parcimonie ?

M, Dressant s’est tiré du rôle de M. de Solis avec un tact parfait, il a su donner un grand air à ce mari morose et guindé. M. Febvre a joué avec finesse le lovelace insolvable, et Mlle Croisette s’est acquittée sans trop de désavantage du sympathique rôle de la comtesse.


R. R.


ESSAIS ET NOTICES.

Traité de climatologie générale du globe, études médicales sur tous les climats, par M. le Dr Armand, Paris 1873 ; Masson.


Les rapports mystérieux qui existent entre les maladies endémiques et les conditions du sol et de l’atmosphère n’ont pas encore été étudiés avec le soin méthodique que réclament l’importance du sujet et les habitudes de la science moderne. Les matériaux d’observation font défaut ou bien sont épars et incohérens ; les données statistiques qu’on possède n’ont pas encore été discutées et mises en lumière comme elles le mériteraient. On ne saurait donc trop encourager des tentatives comme celles de la ville de Paris, qui publie depuis huit ans un Bulletin de statistique municipale, comprenant les observations météorologiques de