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atomes qui équivalent dans les diverses combinaisons à cette unité conventionnelle. Bien que quelques savans persistent à considérer les poids atomiques comme de simples rapports et l’existence des atomes comme un pur artifice logique, il semble plus rationnel d’admettre, avec la majorité de ceux qui ont examiné de près ce difficile problème, que ces atomes sont des réalités effectives, encore qu’il soit très malaisé d’en évaluer exactement les dimensions absolues. En tout cas, on peut affirmer que ces dimensions sont de beaucoup inférieures à celles que présentent les particules de la matière soumise aux procédés de division les plus puissans et les plus subtils, ou décomposée par imagination dans ses élémens les plus ténus. « Que l’homme, dit Pascal, recherche dans ce qu’il connaît les choses les plus délicates : qu’un ciron par exemple lui offre dans la petitesse de son corps des parties incomparablement plus petites, des jambes avec des jointures, des veines dans ces jambes, du sang dans ces veines, des humeurs dans ce sang, des gouttes dans ces humeurs, — que, divisant encore ces dernières choses, il épuise ses forces et ses conceptions, et que le dernier objet où il puisse arriver soit maintenant céleri de notre discours ; il pensera peut-être que c’est là l’extrême petitesse de la nature. Je veux lui faire voir là dedans un abîme nouveau. Je veux lui peindre non-seulement l’univers visible, mais encore tout ce qu’il est capable de concevoir, l’immensité de la nature dans l’enceinte de cet atome imperceptible ! » Pascal montre ici un sentiment aussi juste que profond de l’infiniment petit, et il est intéressant de remarquer combien les révélations étonnantes du monde microscopique ont justifié ses prévisions éloquentes ; mais combien ce monde microscopique, dont les plus petits représentans, tels que les vibrions et les bactéries, n’ont guère moins d’un dix-millième de millimètre, combien ce monde est grossier en comparaison des particules qu’exhalent les corps odorans et les quantités extraordinairement petites que la chimie, la physique et la mécanique mesurent aujourd’hui sans les voir, ou dont elles rendent l’existence manifeste sans les saisir ! M. convient de citer quelques exemples qui en donneront une idée.

D’après M. Tyndall, quand des particules solides très petites, plus petites que les ondes lumineuses, sont répandues dans un milieu traversé par la lumière, celle-ci est décomposée de telle sorte que les moindres ondes (ondes bleues) prédominent dans les rayons réfléchis, et les plus grandes ondes (ondes rouges) dans les rayons transmis. Cet ingénieux physicien explique ainsi que la couleur bleue du ciel doit tenir et tient à l’existence de particules solides, extrêmement ténues, répandues en nombre infini dans l’atmosphère. M. Tyndall n’est pas éloigné de penser que ces parcelles