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le gouvernement de l’empire, rejette tout compromis avec les partisans à un degré quelconque de la politique prussienne, tandis qu’elle sympathise avec tous ses ennemis; elle abjure, comme une erreur des temps passés, le patriotisme; en un mot, le royaume social où M. Schulze-Delitzsch vient d’être détrôné forme dans l’empire d’Allemagne comme un état à part.

Il y a des points de ressemblance extérieure entre l’opposition du parti ultramontain et celle du parti socialiste. Certes les catholiques d’Allemagne ont le droit de repousser l’injure qu’on leur fait en les comparant aux gens sans patrie de l’Internationale; mais, en se souvenant qu’ils sont Allemands, ils n’oublient pas que leur église est universelle. Ils lui attribuent en tous pays des droits imprescriptibles; ils repoussent la doctrine de la souveraineté de l’état comme païenne; la nationalité n’est à leurs yeux qu’une idole moderne : ils refusent de sacrifier à cette « Germania » qu’adorent les nationaux-libéraux, et qui a déjà vu couler à ses pieds le sang de tant de sacrifices humains. Ils sont donc en état de révolte contre l’esprit hégélien, qui en politique conclut à la déification de l’état, contre l’esprit protestant, dont l’étroite union avec la monarchie a fait la fortune de la Prusse, contre l’orgueil allemand, qui n’admet point que l’Allemagne ne puisse suffire à tous les besoins intellectuels et moraux de ceux qui ont l’honneur d’être ses enfans ! — Leur programme, délibéré et arrêté à Berlin pendant la lutte électorale, accuse le différend avec netteté. Après avoir réclamé pour l’église « la pleine souveraineté sur le terrain qui lui est propre, » c’est-à-dire le droit d’administrer sa fortune, de régler les affaires du culte, d’élever ses prêtres, de les ordonner, de les déposer et de les reprendre, sans immixtion de l’état, — après avoir protesté contre la fondation de toute église d’état, dite église nationale, ce programme, passant à la politique, donne mandat aux députés « de combattre avec l’énergie la plus décidée le principe que tout droit vient de l’état; » en ce qui concerne l’organisation de l’empire, il se prononce contre l’abus qui est fait par « le libéralisme » du principe des nationalités au détriment des droits historiques (ceux des souverains par exemple), et demande que l’empire d’Allemagne reçoive une forme fédérative sérieuse. Mettez en face de ces principes ceux des nationaux-libéraux, parti qu’on peut dire révolutionnaire, plein de mépris pour les droits historiques, adversaire acharné du particularisme, partisan d’une Allemagne une et indivisible, et qui nous envie « les bienfaits de la centralisation : » le contraste est aussi complet que possible.

Or aujourd’hui, malgré les efforts du gouvernement et des libéraux, le parti catholique arrive au parlement d’Allemagne avec des forces presque doublées. Il a conservé ses chefs, MM. Reichensper-