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la seconde pyramide, spécimen unique de la belle statuaire officielle de l’ancien empire.

C’est en 1853 que mourut Abbas-Pacha. Son oncle, Saïd-Pacha, fut appelé au gouvernement de l’Égypte. Animé d’un tout autre esprit que son neveu, il fut, comme on sait, l’ami de la France. Pendant l’hiver de 1857-1858, il pria le gouvernement français de lui envoyer M. Mariette, qui était alors conservateur-adjoint du Louvre. Il s’agissait de préparer des fouilles pour le voyage projeté du prince Napoléon en Égypte, voyage qui n’eut lieu d’ailleurs que bien des années après. Les premiers travaux s’accomplirent en partie aux frais du prince; mais bientôt Saïd-Pacha donna à M. Mariette le titre de bey, il autorisa les corvées, encouragea les fouilles, en multiplia le nombre, décréta la conservation des antiquités, défendit aux moudyrs des provinces d’y toucher, donna commission au nouveau directeur des travaux de veiller lui-même à l’exécution de ses ordres, et fonda le musée de Boulaq pour y déposer les monumens. Trente-cinq chantiers furent ouverts successivement sur différens points de l’Égypte et de la Nubie. Il faudrait écrire des volumes pour faire un compte-rendu, même sommaire, de ces immenses travaux; nous voudrions toutefois faire connaître, en les groupant dans l’ordre géographique, les principales découvertes et les faits historiques, archéologiques ou religieux qui s’en dégagent.

Si l’on remonte la vallée du Nil du nord au sud, on rencontre d’abord dans le Delta un point très important près de l’ancienne branche Pélusiaque, au sud du lac Menzaleh : c’est Sân, l’ancienne Tanis. Ce chantier a donné d’importans résultats et a fourni les monumens les plus précieux du temps des pasteurs. Un des rois Hycsos y est représenté sous la figure d’un sphinx colossal, dont quatre analogues ont été découverts par la suite. Les mêmes traits caractéristiques qui distinguent les peuples de race sémitique donnent à ces sphinx un intérêt inappréciable. D’autres statues, appartenant au même type, ont été trouvées à Sân, et prouvent que Tanis, nom sémitique de la ville égyptienne d’Avaris, était bien la capitale de ces rois étrangers, oppresseurs du pays des Pharaons. La conformité de ces types avec celui des habitans actuels des rives du Menzaleh a même conduit Mariette-Bey à reconnaître dans ces derniers les descendans des conquérans, et à les rattacher à la grande famille sémitique fixée de tout temps dans la région voisine de l’Asie, de l’autre côté de l’isthme. Sans croire avec l’historien Josèphe que l’invasion des Hycsos n’est autre que l’immigration de la famille de Jacob en Égypte, il est du moins permis d’attribuer un grand fonds de vérité à l’histoire du patriarche Joseph et d’admettre même qu’il a pu être le ministre d’un de ces Pharaons envahisseurs appartenant à la même race que lui. Le sphinx sémitique de Tanis