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Cet outillage général est combiné de telle sorte que l’on a pu faire face aux nécessités exceptionnelles amenées par des épidémies; en 1849, en 1854, chaque mort eut son cercueil, son corbillard, son convoi, et l’on ne vit plus « rouler les tapissières » comme pendant le choléra de 1832. L’adjudication des pompes funèbres a pris fin le 1er janvier 1871; l’heure était mal choisie pour la renouveler, personne ne s’en souciait, ni l’entrepreneur, ni la préfecture de la Seine. On revint alors à la lettre des décrets impériaux; les fabriques, les consistoires, prirent l’affaire à leur compte et la confièrent en régie à l’adjudicataire sortant. En somme, il n’y eut rien de changé : la ville paie toujours 5 francs par inhumation, les cultes reçoivent toujours 56 pour 100, et les enterremens gratuits sont toujours à la charge de l’entreprise. Seulement la situation n’est plus très régulière; les responsabilités sont déplacées, et aujourd’hui le chef de ce service, qui a une importance municipale sur laquelle il serait puéril d’insister, semble dépendre beaucoup plus des fabriques que de la préfecture de la Seine. C’est là un fait anormal auquel il serait bon de mettre fin. Une difficulté se présentera peut-être lors de la future adjudication: la ville a construit à ses frais, rue Curial, un vaste établissement destiné à loger l’administration des pompes funèbres et toutes les dépendances qu’elle comporte. Les dépenses ont été considérables, et le bail sera élevé; mais cet inconvénient disparaîtra devant des avantages majeurs : aussi le premier article du prochain cahier des charges devra exiger du preneur un loyer rémunérateur représentant l’intérêt normal des sommes employées. Cette condition ne peut même pas donner lieu à un débat, car, malgré les servitudes financières sagement imposées à l’entreprise, celle-ci fait de tels bénéfices qu’ils sont de nature à éveiller de très sérieuses concurrences.

Dans les convois, le principal personnage n’est pas le maître des cérémonies qui, l’air grave et même légèrement attristé, comme il convient à la circonstance, prie « la famille et messieurs les invités » de le suivre : celui-là, il est vrai, mène le chœur funèbre des porteurs et indique avec précision, pendant le service religieux, à quelle minute il faut se lever, s’agenouiller ou s’asseoir; mais l’homme important, c’est l’ordonnateur, agent direct de la préfecture de la Seine, employé de l’état civil et délégué du maire de l’arrondissement que le défunt habitait. Il représente la municipalité prenant le corps d’un de ses administrés à la maison mortuaire, l’accompagnant à l’église, veillant à ce qu’on lui fasse place à travers nos rues encombrées, l’introduisant au cimetière et ne le quittant qu’après avoir vu tomber sur lui la dernière pelletée jetée par le fossoyeur. Il est reconnaissable à la cocarde tricolore maintenue par