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nouvelle où le centre gauche trouverait des garanties d’opinion, et où quelques hommes de cette région mixte auraient leur place. On a dit que M. Dufaure avait été un instant appelé à la présidence. Il n’en est rien. Ce qu’il y a de vrai, c’est, qu’avant tout M. de Goulard a vu effectivement M. Dufaure, dont il a été le collègue sous M. Thiers, dont il connaissait les sentimens de modération et de réserve, et qui a plus d’une fois fait acte d’adhésion publique au septennat. M. Dufaure ne pouvait entrer au ministère ; il s’est prononcé pour la nécessité d’un gouvernement définitif, et il se considérait comme trop engagé devant le pays pour accepter le pouvoir sans mettre tout d’abord au frontispice de son programme cet article véritablement assez simple des lois constitutionnelles qu’il présentait l’an dernier : « le gouvernement de la république française se compose d’un sénat, d’une chambre des représentans et d’un président. » On n’en était pas encore là tout à fait. M. Dufaure restait donc personnellement hors de cause ; mais il ne témoignait ni défiance ni hostilité ; il n’avait au contraire qu’une encourageante sympathie, et, bien loin de contrarier ou d’embarrasser les combinaisons, qui se préparaient, il se montrait tout prêt à les seconder. C’était à ses yeux, un premier pas vers une solution, nécessaire. Quant aux hommes de la partie, la plus modérée du centre gauche qui ont été mêlés de plus près à ces négociations, et qui ont dû avoir un rôle dans le ministère, ils n’acceptaient point évidemment sans avoir obtenu certaines satisfactions d’opinion, sur lesquelles d’ailleurs on s’était d’avance entendu ; mais ils n’avaient point des prétentions démesurées. Dans ces régions du centre gauche, on se contentait de la république organisée et mise hors de question pour sept ans, en réservant l’avenir, en laissant aux assemblées futures le soin de décider à leur tour du régime politique de la France. C’était accepté, et en définitive qu’était-ce autre chose que la régularisation de ce qui existe avec la présidence du maréchal de Mac-Mahon, avec une situation plus fixe, moins livrée aux contestations incessantes et ardentes des partis ? Si ce n’était encore qu’un expédient, il avait du moins l’avantage d’être le seul possible, de mettre un terme à toutes ces querelles subtiles sur le septennat personnel ou impersonnel, en ramenant la question, à l’établissement d’institutions conservatrices qu’on désire avec un nom qu’on ne peut effacer.

D’où est donc venue la difficulté qui a fait tout écrouler au moment où l’on croyait toucher au succès ? Il faut bien le dire, elle est venue encore une fois de la droite. Tout semblait entendu. Dans la combinaison adoptée, deux députés, M. de Cumont et M. Tailhant, devaient représenter la droite ; les membres du centre gauche qui devaient entrer dans le cabinet étaient désignés. M. le duc d’Audiffret devenait ministre sans portefeuille. Le général de Cissey revenait au ministère de la guerre, où il était déjà sous M. Thiers. Le programme paraissait accepté, lorsqu’au dernier moment tout s’est évanoui, le ministère a