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des ressources du budget ; elle était souvent limitée à un intérêt purement local. La loi de 1865 a eu pour objet de faciliter l’établissement de cette catégorie de lignes. Elle attribue aux départemens, aux communes, aux simples particuliers la faculté de les construire, après instruction préalable par le préfet et sur la décision du conseil-général, considéré comme le meilleur juge des besoins de la région et du mode d’exécution des travaux. Toutefois le gouvernement, dont l’intervention apparaît une première fois par l’instruction confiée au préfet, conserve le droit de prononcer en dernier ressort ; les travaux ne peuvent être entrepris qu’après la déclaration d’utilité publique, et à la suite d’un décret délibéré en conseil d’état. Quant à la propriété de ces voies ferrées, elle appartient, non plus à l’état, mais aux départemens, aux communautés locales, selon les clauses insérées dans les actes de concession. Tels sont, au point de vue légal, les signes distinctifs qui caractérisent les deux classes de chemins : cette distinction se résout par une question de propriété. Toute ligne qui doit, à un titre quelconque, être rattachée au réseau national pour demeurer la propriété de l’état, est une ligne d’intérêt général : les autres lignes sont d’intérêt local. Dès lors le rôle actif et même prépondérant que la loi de 1865 réserve au gouvernement pour l’exécution des lignes d’intérêt local s’explique non-seulement par le caractère général de notre législation, qui lui confère en toutes choses des attributions fort étendues et souvent exagérées, mais encore par la nécessité de déterminer d’abord si telle ligne à concéder peut être sans inconvénient distraite du réseau national. Il y a encore un autre motif : comme l’état subventionne la plupart des lignes du grand réseau et qu’il en garantit dans une certaine mesure les revenus, il lui importe de ne point laisser se créer à côté d’elles des lignes d’intérêt local qui, en leur faisant concurrence et en diminuant leurs produits, atteindraient dans le présent le trésor public et déprécieraient pour l’avenir la propriété nationale. Ces précautions, ces réserves, ces calculs si compliqués n’auraient point de raison d’être en Angleterre, ni en Amérique : les conditions particulières du système français les rendent indispensables.

Malgré ces restrictions, la loi de 1865 fut accueillie comme un véritable bienfait. Elle allait permettre la construction d’un grand nombre de chemins qui sans elle eussent été peut-être indéfiniment ajournés, chemins destinés à relier les communes importantes aux gares des grandes lignes ou aux chefs-lieux, à desservir les régions agricoles pour le transport des récoltes et des engrais, ou à rapprocher des courans actifs de la circulation les usines et les mines. La loi n’avait pu écrire une définition précise de ces voies d’intérêt local ; mais, à défaut d’un texte, les commentaires de l’exposé des