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anciennes colonies ? Mais pour la Réunion, la Martinique et la Guadeloupe les chiffres n’ont guère varié depuis 1859 ; ils sont même tombés, à La Réunion, de 60 à 29 millions, et cet affaissement commence en 1864. Au Sénégal, même situation : nos échanges, en quinze ans, ont varié de 16 à 15 millions. C’est au contraire dans les établissemens nouveaux que l’augmentation est rapide ; le plus considérable d’entre eux, l’Algérie, pendant la même période, passe de 181 millions à 288. Les plus petits, Sainte-Marie de Madagascar, Nossibé, etc., sortent peu à peu du néant. En Cochinchine, avant 1868, on ne notait même pas les chiffres : cette année-là, on inscrivit 5 millions d’affaires ; en 1872, il y en avait pour 10 millions. La somme n’est point forte, mais la proportion est satisfaisante. Partout ailleurs nos progrès ont été soutenus et font un contraste avec la routine qui subsiste sur les voies de notre ancien commerce. Avant 1860, nos affaires avec l’extrême Orient ne dépassent pas 6 millions ; en 1867, elles atteignent 64 millions. A partir de cette époque, on commence à décomposer les chiffres : 55 millions pour la Chine, 46 pour le Japon. Il est vrai que les importations dominent de beaucoup ; mais l’habitude des approvisionnemens directs suscitera d’autres affaires. La meilleure manière de trouver des cliens, disait un négociant spirituel, c’est d’acheter soi-même : si vous offrez votre marchandise, on vous éconduit poliment ; comme chaland, on vous accueille, on vous retient, et alors vous pouvez changer de rôle, la glace est rompue. En ce sens, nous sommes encore les cliens des Indes anglaises, où notre commerce a passé de 70 millions à 105 pendant la période des traités, et ceux de l’Afrique occidentale, qui nous envoie de plus en plus ses riches productions, tandis qu’elle résiste à nos offres, grâce à la simplicité de ses goûts et de son costume. Tout autre est notre attitude dans les échelles du Levant et dans l’Amérique du Sud ; là, nous luttons à armes égales sur un sol favorable. Nos relations avec l’Égypte ont pris un vif essor depuis 1863 ; d’une trentaine de millions, les échanges ont passé à 100 millions, dont une bonne moitié revient à nos exportateurs. Avec les états barbaresques, nos affaires ont doublé. L’influence française a son centre naturel sur les bords de la Méditerranée ; si notre pays n’affiche plus la prétention peu moderne d’en faire un lac français, il a le droit de profiter de ses avantages, et il en profite ; le percement de l’isthme de Suez et le développement de l’Algérie nous valent dès aujourd’hui de grands résultats commerciaux. Enfin, si l’on veut se convaincre que ni l’éloignement, ni la diversité des races, ni l’état précaire de la civilisation ne sont un obstacle au développement de nos affaires, il faut aller dans l’Amérique du Sud. Certainement notre commerce n’est pas en rapport avec l’étendue de