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personnages sculptés sont coiffés du pschent et le globe ailé domine cette œuvre égypto-phénicienne. L’une des grottes voisines du village métuali de Vastha, outre des graffiti, quelques lettres phéniciennes et certains signes dont nous parlerons, contient une inscription grecque votive du IIIe siècle avant notre ère. Le décret de Diotime n’ayant pas été gravé en Phénicie, ce texte reste le plus ancien spécimen connu de lettres grecques tracées en Phénicie.

Les ruines d’Oum-el-Awamid, « la mère des colonnes, » avaient éveillé dans l’esprit du chef de la mission de grandes et hardies espérances qui peut-être ne se sont pas toutes réalisées. Certes les débris de cette Laodicée grecque, qui s’appela sans doute à l’origine « ville des Tyriens, » appartiennent bien à l’époque achéménide ou à l’époque hellénique : ils sont vierges, en tout cas, de la lourdeur et de la banalité de l’époque romaine. Quand la Syrie devint province romaine, cette ville n’était déjà plus. Les têtes et quelques poitrines ou croupes de sphinx qu’on y a trouvées rappellent à M. Renan les sphinx de l’allée du Sérapéum de Memphis, qui sont du temps de Psammétique. On connaît désormais la forme particulière que ces animaux fantastiques, désignés sous le nom de cherub, avaient prise en Phénicie. La construction égyptienne du centre de la ville paraît à l’auteur le plus vieux monument d’Oum-el-Awamid. Il ne la tient pas toutefois pour un témoin de l’époque d’Hiram, non plus que pour une œuvre postérieure au temps d’Alexandre ; elle lui paraît contemporaine de la domination perse. Les trois inscriptions phéniciennes qui furent découvertes à Oum-el-Awamid sont aujourd’hui célèbres. La première, qui est de l’an 132 avant notre ère, atteste que sous les successeurs d’Alexandre les vieux cultes nationaux étaient conservés et que l’idiome de Canaan était encore très pur, sans influence sensible de l’araméen. Voici quelle serait, selon M. Renan, la traduction de cette inscription : « Au seigneur Baal des cieux, vœu fait par Abdélim, fils de Mattan, fils d’Abdélim, fils de Baalschamar, dans le district de Laodicée. J’ai construit cette porte et les battans qui sont à l’entrée de la cella de ma maison sépulcrale, l’an 280 du maître des rois, l’an 143 du peuple de Tyr, pour qu’ils me soient en souvenir et en bonne renommée, sous les pieds de mon seigneur Baal des cieux, pour l’éternité. Qu’il me bénisse ! » La seconde inscription est fort courte ; la troisième se lit sur un segment de gnomon dédié à un dieu[1].

Bien qu’elle existe, l’épigraphie sémitique de la Phénicie n’est guère plus riche, on le voit, que l’archéologie. Les monumens publics, les tombeaux, les sarcophages les plus grandioses de Tyr et de Sidon, paraissent être restés anépigraphes jusqu’à l’époque grecque ;

  1. On doit à M. le colonel Laussedat une savante restitution de cet instrument.